Compte Search Menu

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies permettant d’améliorer le contenu de notre site, la réalisation de statistiques de visites, le choix de vos préférences et/ou la gestion de votre compte utilisateur. En savoir plus

Accepter
Critique

« Top Gun : Maverick ». - un film de Joseph Kosinski (USA, 2022)

1017942_top_gun__maverick_1648643818507.jpg

USA, guerre, Navy, patriotisme, Top Gun, Jets, raid, État voyou

publié le par Yannick Hustache

Trois décennies et quelque après « Top Gun », romance aéronavale à succès qui propulsa son interprète principal masculin, Tom Cruise, au rang de star mondiale – position qu’il occupe toujours aujourd’hui, Pete Mitchell « Maverick » est toujours bon pour le service ! Mais question subsidiaire : les années 1980 mourront-elles un jour ?

Sommaire

Retour vers le futur

En matière de suite(s) cinématographique(s), on sait depuis un bon moment que plus rien n’est impossible, quitte à devoir de temps à autre tirer sur la corde de la vraisemblance et substituer l’un ou l’autre acteur/actrice du casting d’origine pour toute une série, avouables ou non de raisons. Kelly McGillis, la Charlie d’origine qui n’a pas souhaité participer au film est remplacée par Jennifer Connelly, de 13 ans sa cadette. Dans les cartons d’Hollywood depuis quelques années et après le décès du réalisateur Tony Scott qui réalisa le premier, le film n’aurait pu se faire sans que Tom lui-même n’en devienne le producteur et l'acteur vedette.

Quant à Pete (Tom Cruise) Mitchell « Maverick », plus très loin de la soixantaine, il a conservé une impeccable forme olympique puisqu’il est toujours pilote d’essai pour la Navy. Il est reconnu pour ses qualités d’aviateur plus qu’exceptionnel, mais c’est aussi une tête brulée (et de lard) qui présente quelques incompatibilités fondamentales avec la discipline et la hiérarchie militaire. Ce qui explique que Maverick a toujours refusé de s’élever au-delà du grade de capitaine (plus haut dans la hiérarchie, c’est le plancher des vaches assuré). Parce que voler lui procure des sensations vitales dont il ne peut se passer.

À l’entame du film, Pete vit seul dans une grande baraque à l’orée du désert de Mojave. Il retape un « vieux coucou », soit un P-51 Mustang datant de la seconde guerre entre deux séances d’essai d’un prototype de jet expérimental capable d’atteindre les mach 10 (soit 10 x la vitesse du son !). Incapable de s’arrêter en si bon chemin, Maverick pousse son avion un chouia au-delà du plafond de verre et... c’est l’accident !

Pressé de prendre sa retraite anticipée, il est « sauvé » par une promotion ( un repêchage) surprise ! Mitchell va devoir revenir et former à la hâte, les meilleurs éléments de l’école de pilotage Top Gun à San Diego pour une mission secrète presque impossible. Arrivé sur place, il est en bute aux réserves du vice-amiral (John Hamm) commandant la base. Reprenant ses marques, il retombe sur Penny, son grand amour de jeunesse, à présent divorcée avec une ado à charge, et tenancière échevelée du bar de la base/école, avant de faire connaissance avec les cadets de Top Gun, parmi lesquels il reconnaît instantanément, Bradley « Rooster » Bradshaw, le fils de son navigateur et défunt ami Nick (« Goose ») Bradshaw …

Tout changer pour que rien ne change !

De fait la mission qui leur est confiée, tactiquement simple, mais casse-gueule dans son exécution. Il s’agit de détruire la base secrète (enfin pas pour les satellites US) d’enrichissement d’uranium d’un « État voyou » - selon l’ONU - avant sa mise en service dans les prochaines semaines. Sise au milieu d’un massif montagneux loin à l’intérieur des terres et défendue par un réseau dense de missiles sol-air dernier cri et par une aviation de défense de la 5eme génération, elle n’est vulnérable que par un raid d’une hardiesse folle zigzagant au travers des canyons, sous les radars…

C’est ici qu’intervient Maverick : il doit former (et choisir) les pilotes capables de préparer et réussir cette mission quasi suicidaire en une paire de semaines !

Jusqu’ici on est pas encore au quart du film, on n’a (pour une fois) quasi rien spoilé mais on est déjà intuitivement certains d’en connaître la fin ! Et finalement dans ce feel good movie supersonique et testéronné , l’important est plutôt comment on va y arriver, et si la nostalgie va suffire à (r)allumer le souvenir chez les uns (ceux qui avaient vu le film à l’époque ou depuis) et soulever l’enthousiasme des jeunes générations à coups de cascades aériennes virtuoses et de babillages amoureux.

Tout le film baigne dans une sorte de patriotisme naïf (des Stars & Stripes en veux-tu, en voilà !) s’étirant dans une imagerie eighties ensoleillée mi reaganienne mi publicitaire. Les cadets, bien que moins stéréotypés WASP et davantage issus de la diversité, font montre d’une même niaque à devenir les meilleurs de leur génération et rivalisent de zèle à défendre leur pays (ou à faire des pompes !), dans une même absence complète de personnalité. Jamais le doute ne semble les affleurer et les conflits auxquels les U.S.A. ont pris part depuis 1986 (dont deux guerres en Irak) sont juste évoqués comme des « boulots » comme les autres. À l’exception du tabac et des téléphones portables (discrets), c’est la Californie paradisiaque des plages, des sportifs, des gens beaux et en pleine possession de leurs moyens, qui bossent sans compter, des optimistes qui boivent encore fièrement de la « Bud » (alors que le pays s’est fait une spécialité reconnue dans le craft beer sous toutes ses déclinaisons…) et conduisent leur moto/véhicule tête nue. Le match de football US (ben oui) entre cadets organisé par Maverick en bord d’océan Pacifique et son festival d’éphèbes qui rivalisent de barres de chocolat, semble tout droit sorti de la série Baywatch et le prévisible rabibochage Mitchell/Charlie pourrait porter un liseré spécial « lu dans Arlequin ! ». C’est à se demander si ce film, s’il était sorti en salle quelques semaines avant la dernière élection présidentielle américaine eut pu influencer le résultat du scrutin.

Nostalgie encore côté fond sonore et soundrack. Non seulement quelques titres de la B.O. d’origine (« Danger Zone » de Kenny Loggins) repassent le temps d’un ultime looping rétro-musical, mais ici aussi Maverick titille en plein la nostalgie du temps où le pop/rock F.M. et ses balades héroïques et/ou tire-larmes, régnaient sur les ondes. Invitée de luxe, Lady Gaga (et à un degré moindre OneRepublic) se fait presque sobre dans son numéro de revivalisme romantique, entre bluettes fleur-bleue et morceaux de bravoure.

D’un point de vue purement militaire, les F-14 Tomcat, emblématiques du premier film ont été mis à la casse/retraite (depuis 2006) mais les F-18 Hornet biplace, en service depuis les années 1980 et continuellement améliorés constituent toujours l’ossature offensive de la Navy. Et face à un ennemi qui disposent de chasseurs de la cinquième génération, presque entièrement automatisés, c’est dans l’expérience acquise des pilotes que doit se faire la différence. C’est bien là que réside la mission de Maverick : réussir l’impossible !

Dont’think, act !

Mitchell est quelque part un survivant qui semble incapable de raccrocher. Trois décennies après son passage Top Gun est pour lui devenu un mausolée hanté par les souvenirs et les ombres de ses compagnons de promotion disparus ou condamné(s) à brève échéance (l'amiral Tom « Iceman » Kazansky – Val Kilmer - au stade terminal d’un cancer).

Contre l’avis de ses supérieurs pour lesquels l’avenir de l’aviation militaire se situe dans le tout-à l’électronique, faisant du pilote un simple auxiliaire de la machine, Maverick continue de penser que ce sont hommes (et les femmes) poussés dans leurs ultimes retranchements qui offriront les meilleures garanties de succès. Car la réussite de la mission tient d’une gageuse, les pilotes devront à un moment crucial du raid, encaisser un certain nombre de « g » aptes à assommer les plus résistants. Sauf que notre ex-pilote d’essai, toujours capable, à bord de son jet ; d'en remontrer à n’importe lequel des plus doués des blanc-bec de son école, juge la chose faisable. Son secret l’instinct d’aviateur et… la confiance absolue dans ses ailiers. À plusieurs moments-clés du film, des considérations purement humaines telles que revenir chercher un allié abattu contre les ordres donnés, viennent se heurter à l’autorité militaire et à la planification rigoureuse des opérations. Mais paradoxalement, la réussite finale de la mission devra beaucoup à ces petites désobéissances successives et manquements à la discipline, justifiées « parce qu’on ne doit laisser personne derrière ». Même s’ils sont le produit final d’une impitoyable sélection, les pilotes gardent en eux un sens aigu et très personnel de la communauté. Ils ou elles sont certes, humains et donc imparfaits, mais ce sont ces imperfections et leur dépassement constant qui les rendent toujours indispensables. Le tout à la machine, le recours massif à l’intelligence artificielle et aux datas dans les armées modernes, ici via satellites, drones et avions sans pilote, est rejeté non sans ambigüité quant à la nature intrinsèquement meurtrière de leur job.

Mission accomplie ou crash en plein vol !

Si « Top Gun Maverick » ne cache pas une seconde sa nature clinquante de blockbuster héroïque ET romantique sans que le spectateur lambda ne doive abaisser trop rapidement son seuil personnel de vigilance et de vraisemblance critique. Il dose assez habilement les scènes d’action (entrainement et combat), plus nombreuses, efficaces et virtuoses que dans « l’original », rabibochage sentimental attendu (Pete & Charlie ne s’étaient plus vus depuis 30 ans) presque sans anicroche (c’est aussi limpide que la transparence d’une « Bud » et son goût d’industrielle passe-partout), et rapports conflictuels en partie hérités du premier TG dans une intrigue de jeu vidéo à l’ancienne. Mais à l’issue du film, tant au niveau de ses irrévérences /oppositions de principe continuels à la hiérarchie que dans ses relations compliquées (et travaillées par les non-dits du passé) avec les jeunots, tout est oublié dans une scène de hugs collectifs sur pont de porte-avion entre d’une ampleur jamais vue, même avant le Covid !

Plutôt solitaire et peu causant, mais au top de sa forme physique olympique, Tom Maverick Cruise fait le job malgré un répertoire de mimiques et d’expressions faciales de plus en plus limité (le collagène, ça vous gêne !) oscillant sur l’échelle de variation musculaire entre 1,2 et 1,9 possibilités ! Heureusement, il y a Jennifer Connelly qui semble s’amuser comme une folle dans son rôle de future promise (de rechange).

Et puis, on se dit quelque part que la Navy a quand même bien de la chance d’avoir un adversaire non identifié mais aux traits russes (mais chut !) et iraniennes (l'Iran est le seul pays à posséder des Tomcat ) mélangées (le hasard sans doute !), qui semble posséder une technologie plus avancée qu’elle (mais comment est-ce possible ?), mais qui laissent des avions déclassés (des F14, la chance !) armés sans presque aucune surveillance, certes à l’abri dans une base dite secrète, derrière un simple grillage pas très solide. La chance pour un aviateur sans taxi qui s’échouerait par hasard dans le coin…

Des adversaires négligents comme ça, ça se mérite !


TOP GUN: MAVERICK- JOSEPH KOSINSKI

États-Unis, 2021 - 2h11

Texte: Yannick Hustache

Crédits photos: Sony Pictures

1017942_fr_top_gun__maverick_1648642109245.jpg

Agenda des projections :

Sortie en Belgique le 25 mai 2022, distribution Sony Pictures

Le film est projeté dans la plupart des salles de Belgique.

Classé dans