A la fois retour aux sources et nouveau départ, Mundo Civilizado est l'album qui allait confirmer Arto Lindsay dans sa deuxième carrière de chanteur de charme brésilien. Suite directe de O Corpo Sutil sorti l'année précédente, il approfondit l'association de la musique brésilienne avec la pop électronique new-yorkaise. Quoique né en Virginie, Arto Lindsay a passé une grande partie de son enfance au Brésil, dont la musique sera une inspiration récurrente tout au long de sa carrière. Ses premières armes musicales seront pourtant tout à l'opposé, et son premier groupe, DNA, sera parmi les plus féroces de la scène no-wave des années 80. Il alternera ensuite les projets pop (l'excellent Ambitious Lovers avec Peter Scherer), et les formations expérimentales (avec John Zorn ou avec John Lurie) où excellent sa voix et son jeu de guitare inimitable, brutaliste et faussement maladroit. Avec ce nouveau projet il mêle des chansons en portugais ou en anglais, à l'atmosphère feutrée, à des beats électroniques rappelant l'illbient du label wordsound (une mesure de dub, une de drum'n bass et une de hiphop) ou le crossover d'Everything but the Girl à la même époque. Arto Lindsay aime les collaborations et possède un carnet d'adresse impeccable. Pour son disque précédent il avait réuni autour de lui Brian Eno, Vinicius Cantuária, Naná Vasconcelos, Melvin Gibbs, Yuka Honda, Towa Tei, Bill Frisell, Joey Baron, Marc Ribot, Romero Lubambo, Cyro Baptista, Ryuichi sakamoto et Amadeo Pace. Pour ce nouvel album il retrouve de plus son ancien complice Peter Scherer, et s'adjoint la collaboration de Bernie Worrel, Mutamassik et de DJ Spooky, entre autres personnalités. Un tantinet moins bossa que son prédécesseur, Mundo Civilizado explore par contre d'autres musiques brésiliennes et notamment les percussions de la samba et de la batucada qui s'entremêle de manière étonnante avec les sons synthétiques de New York. Par-dessus ces textures hybrides, Arto Lindsay laisse libre cours à ses talents de crooner, alliant la suavité du Brésil à la sensualité de la soul. (Benoit Deuxant)