Des régions frontières emblématiques d'Europe, d'Asie, d'Afrique et des Amériques permettent d'étudier les discontinuités ou modes de jonction entre des espaces géographiques distincts, à différentes échelles, ainsi que leurs effets sur les populations, les modes de représentation de l'espace, les États... À travers le regard de ceux qui vivent au quotidien dans ces régions frontières, cette série fait découvrir les paysages, les mentalités, les enjeux économiques et politiques liés à la problématique des lignes de partage, imposées par la nature ou tracées artificiellement par les hommes.

Le long cours du fleuve Sénégal apparaît comme une frontière naturelle, une ligne bien nette qui sépare sur plusieurs centaines de kilomètres le Sénégal de la Mauritanie. En réalité, cette frontière n'a rien de naturel, elle n'a été créée que très récemment.

Pendant la période coloniale, la France possédait et gérait toute l'Afrique Occidentale française. La ville de Saint-Louis du Sénégal, située sur une île à l'embouchure du fleuve, était à cette époque la principale ville de la région. Aujourd'hui, seules les vieilles maisons coloniales évoquent encore cette ancienne puissance. En 1956, La France a découpé cette zone en huit territoires autonomes. C'est ainsi que le fleuve Sénégal est devenu une frontière. Ce découpage arbitraire est à l'origine de bien des conflits.

La nouvelle limite artificielle a brutalement séparé les familles ainsi que les communautés de paysans, d'éleveurs et de pêcheurs qui vivaient dans la vallée. Les deux états contrôlent étroitement leurs frontières et les points de passage sont rares. La ville de Rosso est l'un des seuls postes où l'on peut franchir le fleuve. En 1989, un incident frontalier a provoqué une crise violente et meurtrière entre les deux pays et a entraîné la fermeture de la frontière pendant trois années.

Mais le fleuve Sénégal n'est pas seulement une séparation entre deux nations, il est un élément de rapprochement car dans cette zone du Sahel où l'eau est un bien précieux et vital, les pays doivent s'entendre afin de mettre en place un système de gestion rationnel de l'eau.