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Playlist

Échos à l’expo de Mu Blondeau (LLN) : médiagraphie fonds marins

Georges Méliès : "Deux cent milles sous les mers" - 1907 - Wikimedia
En collaboration avec le laboratoire de biologie marine de l’Université catholique de Louvain (UCL), l’artiste Mu Blondeau travaille des dessins vivants à partir d’organismes marins bioluminescents et expose actuellement à Louvain-la-Neuve. En rebond, une série de compositions, disques, prises de sons et films eux-aussi inspirés par les grands fonds.

Sommaire

Mu Blondeau : exposition Éclaboulinures (2022)

Quand des micro-organismes marins bioluminescents créent un théâtre d’ombres

MU Blondeau : "Eclaboulinures´" Twitter

Mu Blondeau : "Eclaboulinures" (source : Twitter)

L'artiste Mu Blondeau poursuit un Doctorat en Art et Sciences de l'Art à l’UCLouvain. Son projet, ancré dans le laboratoire de biologie marine de l’université, lui permet de transgresser les genres et de mettre au point de réels dessins vivants à partir d’organismes marins bioluminescents.

L’exposition est enrichie de la présence de quelques pièces, relatives à la vie aquatique, issues des collections scientifiques de l’UCLouvain.


Exposition
Éclaboulinures

Jusqu’au Jeudi 5 mai 2022

Forum des Halles
(Galerie des Halles, à côté des guichets de la gare)
1348 Louvain-la-Neuve


Richard Fleischer : 20.000 Leagues Under The Sea (1954)

Les romans d’aventures et d’anticipation de Jules Verne ont très tôt inspiré les cinéastes de fiction, Georges Méliès (cf. ci-dessous) et toute sa descendance spirituelle. En 1954, Walt Disney donne les pleins pouvoirs (Technicolor, Cinemascope, le plus gros budget jamais consacré à un film à l’époque, un casting de rêve, des décors et effets spéciaux particulièrement soignés et récompensés l’année suivante par les Oscars respectifs) pour leur première grande production en dehors du champ du dessin animé. James Mason incarne le Capitaine Nemo, Kirk Douglas le harponneur Ned Land, Paul Lukas le biologiste marin Pierre Aronnax et Peter Lorre (cf. M le Maudit) son assistant Conseil. Un Nautilus à l’architecture intérieur très Art nouveau explore les fonds sous-marins (ou en tout cas le décor sous-marin de 60m de long que le décorateur John Meehan a construit en studio. N’évacuant pas la dimension misanthrope utopique/dystopique de la vision du Monde de Nemo, le film joue cependant surtout la carte de scènes d’action spectaculaires comme la plus fameuse d’entre elles : le combat contre la pieuvre géante ! [PD]


Georges Méliès : Deux cent milles sous les mers ou Le Cauchemar d’un pêcheur (1907)

En 1907, le grand défricheur du cinéma d’aventures et d’effets spéciaux tourne sous forme de parodie un premier hommage au roman à succès de Jules Verne paru 37 ans auparavant. Yves, un pêcheur s’endort et rêve d’un voyage en sous-marin où il se bat contre un poulpe et est finalement secouru par un groupe de naïades incarnées par les danseuses du Théâtre du Châtelet. [PD]


Claude Debussy : La Cathédrale engloutie (1910)

La Cathédrale engloutie se base sur la légende bretonne de la ville d’Ys, telle que reprise par Ernest Renan dans ses Souvenirs d’enfance et de jeunesse.

Ys aurait été construite par le roi Gradlon pour sa fille Dahut dans la baie de Douarnenez, dans le Finistère. Construite sous le niveau de la mer et protégée par de hautes digues, elle fut submergée par la mer lorsque le diable, qui avait gagné la confiance de Dahut après l’avoir séduite, ouvrit les portes des digues. On dit que, par certains matins de brume, la cathédrale émerge des flots au son des cloches et de la musique de plain-chant avant de sombrer à nouveau.

Pour traduire ce tableau ténébreux, Debussy a utilisé de larges accords partant des notes les plus graves du clavier aux plus aigües, rendant ainsi l’illusion de la profondeur. Il n’y a pas de véritables lignes mélodiques, mais de lents accords arpégés qui illustrent ce monde obscur. Debussy a aussi emprunté un style volontiers médiéval pour rappeler la musique de plain-chant, ainsi qu’un important usage de la pédale, « noyant » ainsi les sons dans un nuage harmonique. [NR]


John Zorn : « La Cathédrale engloutie » (1992)

Parmi les 24 Préludes pour piano que Debussy écrivit entre 1909 et 1913, La Cathédrale engloutie est de ceux qui ont peut-être le plus marqué l’imagination des mélomanes et des musiciens. John Zorn l’a arrangée à sa manière. [NR]


Wahnfried : « Abyss » (1994)

Les abysses, peut-on y tomber plus bas ? Dans un mélange d’IDM (Intelligent Dance Music) mâtinée de synth-pop instrumentale rococo, l’album Trancelation caractérise bien l’esprit des années 1990, l’époque où se propageait une musique techno-ambient, proche de la dance. Cela pourrait paraître banal si l’on ne connaissait pas Wahnfried.

Richard Wahnfried est le pseudonyme que se choisit Klaus Schulze pour réaliser des albums différents de ce qu’il produit sous son propre nom. Exit pour un temps le côté planant, ce sont dorénavant des titres plus courts, davantage dans l’air du temps. Et si le résultat n’est pas décevant, il n’est pas exceptionnel non plus : de la techno (« Crazy About »), de la trance (« Transistor Radio », « Intrance »), et de l’ambient avec « Abyss ».

Un rythme obsédant imprime ce titre qui s’étend sur huit minutes. Une vague évocation des fonds marins où on peut (en cherchant bien) reconnaître des remous aqueux et, passés à la moulinette du vocoder, les trémolos d’une sirène en mutation et la voix d’un Poséidon un peu arrogant.

On est loin des sommets des synthés analogiques des années 1970, on est plus bas, sous l’eau, même si Klaus Schulze, quelques jours après sa mort, reste insubmersible. [DM]


Drexciya : The Quest (1997)

Drexciya est un duo de musique électronique composé des musiciens James Stinson et Gerald Donald. Le groupe, qui a longtemps maintenu le secret sur son identité, fait partie de la seconde génération de producteurs de techno de Detroit. Dès ses débuts à l’orée des années 1990, il s’est constitué autour d’une mythologie sous-marine afro-futuriste, inspirée en partie par les thèses développées par l’écrivain Paul Gilroy dans son livre The Black Atlantic. Dans ce mythe fondateur, les Drexciyans sont les habitants d’une terre abyssale fondée par les enfants des femmes africaines enceintes jetées à la mer par les trafiquants d’esclaves. Ces enfants se sont adaptés à la vie aquatique et ont reconstitué une civilisation technologique, comparable à l’Atlantide, concevant des villes-bulles et de puissants vaisseaux sous-marins, escortés par des armées de raies manta apprivoisées. Le mythe de Drexciya a été développé par le groupe à travers sa musique, ses interviews, ses textes d‘accompagnement, et plus tard a été raconté dans une série de bandes dessinées (The Book of Drexciya), illustrées par Abdul Qadim Haqq, collaborateur du groupe depuis ses débuts. [BD]


Jana Winderen, spécialiste des sonorités sous-marines (2009 – en activité)

Jana Winderen (photo Palin Ansusinha)

Jana Winderen (photo Palin Ansusinha)

Jana Winderen est une musicienne et chercheuse norvégienne qui s’est spécialisé dans les sonorités sous-marines. Elle a documenté la vie des fonds marins depuis la bio-diversité des eaux douces jusqu’aux profondeurs des océans, en passant par les zones frontières entre les mers et les glaciers du grand Nord. Son travail la confronte aux éléments, glaciation et dégel, courants marins et fonte des pôles, mais aussi à la faune aquatique depuis les poissons petits et grands jusqu’aux insectes et aux crustacés en passant par ce qui est selon elle « les gens les plus bruyants de la planète » : les crevettes nordiques. Elle organise ses enregistrements réalisés avec différents modèles d’hydrophones en des concerts et des installations sonores immersives, et publie régulièrement sur le label Touch. [BD]

https://www.janawinderen.com/


George Crumb, Vox balaenae, pour trois instrumentistes masqués (flûte, violoncelle et piano) (1971)

La musique de George Crumb est singulière dans l’histoire de la musique américaine. Elle se distingue par son goût pour les recherches de timbres, l’exploration de la voix et sa réflexion sur l’acte de jouer. Pour cette raison, le compositeur donne souvent des injonctions scéniques très précises. C’est le cas pour Vox Balaenae, écrit pour trois instrumentistes masqués, qui doivent jouer en pantomime sur une scène baignée de lumière bleutée. L’usage de demi-masques sombres (des loups) permet de déshumaniser les musiciens afin de figurer la face impersonnelle de la nature tandis que la lumière bleue plonge les auditeurs dans l’univers glacé de l’océan.

Vox Balaenae s’inspire, comme son titre l’indique, du chant des baleines. L’œuvre comprend huit mouvements dont les titres retracent l’histoire géologique et biologique de notre planète : du début des temps à la fin des temps, de l’archéozoïque au cénozoïque, du primitif au complexe. Les trois instruments sont tous amplifiés. Outre leur usage habituel, d’autres sons en sont tirés avec beaucoup d’ingéniosité : cordes du piano frappées par des baguettes de verre, flûte simultanément jouée et « parlée », sifflements, sons harmoniques en glissandi... Outre le chant des baleines, on perçoit le cri de mouettes, et une allusion à peine voilée à Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss, ainsi qu’est peinte la profusion de la vie à l’ère Mésozoïque, juste avant l’âge de l’Homme, « dramatique, avec un sens de destin imminent » (Crumb). Une œuvre où se cultive le mystère des grands fonds dans un climat imprégné de poésie. [NR]


Vangelis : Invisible Connections (1985)

Après Beaubourg en 1978, avec lequel Vangelis s’était essayé à la musique atonale, surtout pour se débarrasser de sa maison de disque RCA, voici sa deuxième incursion dans la musique d’avant-garde, un peu plus maîtrisée que la précédente.

Invisible Connections nous plonge dans une musique électronique atmosphérique aux tonalités proches du dark ambient. Pas de rythme, de mélodie ou d’harmonie facilement repérable. Le champ sonore qu’il développe évoque soit l’espace sidéral, soit les grands fonds marins : l’utilisation excessive de la réverbération, de l’écho, du sustain, ainsi que les quelques cliquetis me font plutôt pencher vers les abysses, monde sombre où, vaguement, se perçoit le crépitement des crevettes et dans lequel les ondes du sonar se répondent en écho-system. Les scintillements des sons aux synthés sont aux êtres luminescents. Les silences sont aux descentes en apnée. Et, dans les profondeurs des Mariannes, voici la quiétude océane… [DM]


Steve Roach : Stillpoint (2020)

Les deux tiers de la planète sont occupés par les abysses et pourtant ce monde profond ne nous est pas encore fort connu. Créatures monstrueuses, êtres photogènes, faune mystérieuse peuplent notre imaginaire que nourrissent toujours davantage les rares documentaires qui émergent sur nos écrans.
Représentant le plus emblématique de la musique ambient américaine depuis les années 1980, Steve Roach a peaufiné sa musique planante atmosphérique afin de restituer, avec Stillpoint, non pas les sonorités des grands fonds, mais un imaginaire sans lumière, sombre et pesant, « embrassant les sens dans une expérience de sécurité et de chaleur semblable à un utérus. » (1)

Sur la première plage, les longues vagues de Serenity in Waves offrent le transat parfait pour une relaxation aux reflets changeants, un assoupissement garanti, attention aux coups de sommeil.

Puis les voilà, les abysses de Deeper… Still. Plus phosphorescentes dans leurs sonorités, elles enveloppent le paysage d’ombres douces, alternant les teintes de noir profond à l’obscurité éblouissante. Et, de ses amples nappes électroniques sous-marines, Steve Roach dresse notre table de chevet pour un long repos abyssal. [DM]

(1) Stillpoint, créé en une semaine en décembre 2019, a été publié d’abord uniquement sur Bandcamp. Steve Roach a commenté cette œuvre créée pour « une lecture en boucle infinie, du jour à la nuit et dans le domaine du sommeil. »


Smog : « Bathysphere » (1995)

Smog : « Bathysphere »

When I was seven
I asked my mother
To trip me to the bay
And put me on a ship
And lower me down
Lower me out of here

Because when I was seven
I wanted to live in a bathysphere

Between coral
Silent eel
Silver swordfish
I can't really feel or dream down here

And if the water should cut my line
And if the water should cut my line
Set me free
And if the water should cut my line
Set me free, I don't mind
I'll be the lost sailor, my home is the sea

When I was seven
My father said to me
'But you can't swim'
And I've never dreamed of the sea again

Quand il avait sept ans, Bill Callahan voulait-il vraiment vivre dans une bathysphère et explorer les profondeurs de la mer ? En tous cas, la chanson qu’il a écrite à ce sujet en 1995 pour l’album Wild Love nous y emmène, avec sa musique répétitive mélangeant cordes hypnotiques et instruments rock. On peut ne pas aimer les chansons de son groupe Smog, quelque peu déprimantes, mais « Bathysphere » est clairement un morceau qui obsède et qui reste longtemps dans la tête. Et si en plus, il nous fait rêver des fonds marins et nous propose d’entrevoir le corail, les anguilles silencieuses et les espadons argentés, que demander de plus ? [ASDS]


The Chills : Submarine Bells (1990)

Le groupe néo-zélandais The Chills a débuté dans les années 1980 sous l’impulsion de Martin Phillipps, son principal auteur-compositeur. Initialement associé à la scène de Dunedin, et au label Flying Nun, The Chills a connu plusieurs incarnations successives avant de signer en 1990 sur le label américain Slash. Leur premier album pour cette major s’intitulait Submarine Bells et leur a apporté quelques-uns de leurs plus grands succès non seulement chez eux en Nouvelle-Zélande mais également dans les charts internationaux, avec notamment le morceau « Heavenly Pop Hit ». La plage titulaire conclut l’album et justifie sa pochette subaquatique et sa magnifique méduse bleutée. Il y est question du « son sublime de carillons engloutis » qui « se propagent tellement plus loin dans les profondeurs marines ». [BD]


Labradford : Labradford (1990)

Fondé en 1991et d’une durée de vie d’exactement dix ans, Labradford est un trio U.S. d’ambient à guitares, requalifié post-rock par la suite. Robert Donne, Mark Nelson, et Carter Brown qui le compose, empilent et tissent de longues et obsédantes strates faites de boucles synthétiques, qu’ils lestent de lignes de basses d’inspiration dub au ralenti, de motifs de guitares flottantes et fuyantes, de cliquetis rythmiques métronomiques et de mini effets de sonar, et habitent les insaisissables structures ainsi formées de leurs voix fantomatiques qui s’en échappent doucement, tels de lointains échos et appels des abysses. Une musique d’exploration intérieure qui se prêtent à merveille à toutes les expéditions dans des profondeurs océanes toujours plus obscures. On attend encore les commandants Cousteau du XXIème siècle ! [YH]



une médiagraphie de Anne-Sophie De Sutter, Nathalie Ronvaux, Philippe Delvosalle, Benoit Deuxant, Yannick Hustache, Daniel Mousquet (de la Rédaction de PointCulture)


image de bannière : Georges Méliès : Deux cent milles sous les mers ou Le Cauchemar d’un pêcheur (1907) - Wikimedia / domaine public