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Critique

ULTRA LOUNGE 03 - SPACE CAPADES

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Années 50-60 : en réaction peut-être à la « menace soviétique », les États-Unis d’Amérique semblent connaître une période d’assurance morale et esthétique sans précédent. Secondé par de puissants adjuvants (puissance militaire, cinéma, musique, […]

Années 50-60 : en réaction peut-être à la « menace soviétique », les États-Unis d’Amérique semblent connaître une période d’assurance morale et esthétique sans précédent. Secondé par de puissants adjuvants (puissance militaire, cinéma, musique, électroménager), c’est tout un mode de vie qui s’exportait par-delà les continents. En retour, le monde et ses peuples bigarrés pénétraient les foyers de la classe moyenne américaine, moyennant un gommage glamour des us et coutumes, des particularismes culturels. Avec à disposition un restaurant à la mode Tiki « à côté de chez soi » (ses cocktails servis dans des mugs en forme de statues de l’île de Pâques, ses serveurs chinois déguisés en bons sauvages polynésiens), les amateurs d’évasion et d’exotisme pouvaient s’offrir quelques frissons à peu de frais, titillés qu’ils étaient par les images toc teintées d’un zeste d’érotisme, seule entorse faite au conservatisme et au moralisme de l’époque.
Et inutile d’attendre les progrès technologiques de la NASA pour s’offrir une petite mise au vert orbitale : la hi-fi et la stéréo naissante y pourvoyaient sans peine ainsi qu’on pouvait le lire au verso d’une pochette de 33 tours de l’époque : « Certains envisagent de partir sur la lune. Nous avons accompli ce voyage et sommes déjà de retour. Vous aussi pouvez à présent nous rejoindre. Pas besoin de combinaison spatiale… Pour cela, il vous suffit seulement de bons woofer et tweeter, d’un confortable fauteuil et d’une imagination sans borne ». C’est donc avec un sloe gin fizz à portée de main et assis au milieu de son salon qu’il faut savourer Space Capades, une compilation qui a vu le jour en 1996, au plus fort du revival easy-listening (souvenez-vous de Mike Flower’s Pop et de ses reprises sucrées de succès d’Oasis). Le programme débute avec les exaltantes violonades du David Rose and his Orchestra et se poursuit de titres swinguants et jazzy en rhapsodies futuristes. Promenade dans la Mer de la Tranquillité avec le superbe Moon Mood du groupe Les Baxter and his Orchestra, l’un des tout premiers enregistrements usant du theremin, oscillateur électronique muni d’antennes qui deviendra l’indispensable gadget sonore du moindre film SF durant les années cinquante. Et le disque de continuer d’écouler élégamment ses glamoureuses traînées de poussière stellaire.
Il est bien entendu facile d’apposer sur ce type de productions l’infamant label « kitsch » et de le réserver aux seuls amateurs de culture américaine « white trash ». C’est oublier que ces fictions sonores, tout en remodelant le monde et en adaptant celui-ci aux attentes, plutôt conservatrices, de leur audience idéale (en gros, les classes moyennes colonisant les suburbs), ont été également un fertile terrain d’expérimentation : exploitation de la stéréophonie, utilisation de nouveaux timbres, de couleurs sonores inédites, etc., ‘Mutant mood music’ dans le village global américain.
À noter que Space Capades constitue le premier épisode d’une longue série de compilations thématiques d’intérêt variable (mentions spéciales pour Mondo Exotica, Rhapsodesia et Bachelor Pad Royale) mais à chaque fois commentées et illustrées avec humour et agrémentées de très rafraîchissantes recettes de cocktail.

Écoute recommandée :
Attilio MINEO : « Man In Space With Sounds » - XM595I


Jacques De Neuville

 

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