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Critique

VAMPIRE WEEKEND

publié le

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vampire weekend à la bibliothèque

Il y a un an, on citait leur nom sur les blogs et les sites des têtes chercheuses musicales les plus curieuses et perspicaces. Aujourd'hui tout le monde en parle, en bien ou en mal, aussi sur le papier glacé des entremetteurs de musiques considérées comme simples distractions ou marchandises. En anglais - qui a depuis longtemps contaminé le français du journalisme rock - et en quatre lettres cela s'épelle «hache, i grec, paye, euh » : hype (sens originel du mot : exagération). Un magazine urbain new-yorkais, qui n'aime pas trop les quatre post-étudiants bibliophiles aux délicats minois de gendres idéaux, a même prévu avec un certain humour - et graphiques à l'appui - la suite logique de leur médiatisation exagérée : pré-frémissement / brouhaha (buzz) / éloges / saturation / sur-saturation / retour du balancier / renversement du retour du balancier… Tout un programme, moult fois répété dans le cas de leurs prédécesseurs…

pochette du disque XV045ZEt pourtant, personnellement, la cire qui fait tenir leur chatoyant plumage musical me paraît pouvoir résister à la chaleur de ces sunlights médiatiques. Si, comme des enfants trop curieux un mercredi après-midi pluvieux, on se met à démonter la machine Vampire Weekend, on reconnaîtra beaucoup de ses pièces détachées : une loupiote Animal Collective (avec qui ils ont tourné), un engrenage Talking Heads (époque « Fear of Music » / « Remain in Light »), un ressort Feelies (l'insurpassé et bien nommé « Crazy Rhythms » bien sûr)… Sans oublier les inévitables références à la musique africaine ou caribéenne (Orchestra Baobab, calypso et reggaeton en passant par la case « Graceland » de l'agent d'import/export Paul Simon) citées dans le moindre articulet écrit sur VW [au passage : cela fait quand même plaisir d'entendre un groupe de jeunes blancs-becs américains citer - apparemment spontanément et sincèrement, et non comme une leçon de marketing culturel machiavéliquement apprise par cœur - quelques bribes de filiations un peu plus inattendues que la moyenne…]. Mais, la musique de Vampire Weekend est plus que la somme de ses parties. Tenter de remonter les pièces dévissées et déboîtées comme gamins nous essayions - maladroitement et… sans y parvenir - de discrètement redonner au réveil parental son apparence et son fonctionnement d'origine ne mènera à rien. Même avec le mode d'emploi, il y manquera toujours un précieux lubrifiant non vendu dans le commerce : la personnalité des quatre membres du groupe, leur vécu (affinités, amitié, excitations partagées, parcours initiatique, apprentissage commun de la musique…). Car plus qu'une machine ou un produit manufacturé, Vampire Weekend c’est juste quatre copains dont la musique - c'est un bon test - ne tire pas la gueule dès qu'on la kidnappe hors du studio ou de la scène et qu'on l'éloigne des consoles d'effets qui permettent de tout faire bien sonner pour la transplanter dans une cour d'immeuble parisien sans rallonge électrique et avec deux poubelles en plastique en guise de batterie.

Toutes les trois lignes écrites sur ce groupe, on tombe aussi sur les mots « légèreté », « chaleur » et « couleurs » (vision naïve du monde qui fait semblant de croire que la vie est nécessairement plus belle en couleurs qu'en nuances de gris; cent et dix ans d'histoire du cinéma nous ont prouvé le contraire)… Personnellement pour la pop en général - et leur pop, en particulier - je préfère toujours l'image de la bogue (de châtaigne, de marron) retournée : le duvet soyeux à l'extérieur, les picots à l'intérieur.

Philippe Delvosalle

 

 

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