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Critique

RHYTHM

publié le

En 2007, l’Allemand Frank Bretschneider publie l’album Rhythm, un disque qui donne, sans le support de l’image, une idée assez précise du sens de la pulsation rythmique qui est le sien : entre mathématiques modernes et minimalisme.

Né en 1956 à Karl-Marx-Stadt (rebaptisée depuis Chemnitz) en République démocratique allemande, Frank Bretschneider met le pied à l’étrier musical dès 1984 au sein d’Ag Geige. Un groupe d’obédience post-punk, féru des Residents, de Dada et du surréalisme, et qui cherche déjà à briser la monotonie des concerts par une mise en scène étudiée et des tenues de circonstance. La troupe s’exprime principalement en allemand et au moyen de guitares mais utilise déjà des sonorités électroniques tirées du matériel rudimentaire disponible à l’époque. À la fin d’Ag Geige, en 1992, Bretschneider crée son propre label, Rastermusic, qui fusionnera en 1996 avec Noton, celui fondé par Carsten Nicolai (alias Alva Noto), par ailleurs né dans la même ville et avec lequel il s’associe de façon continue au sein du trio Signal (avec le concours d’Olaf Bender), pour devenir l’influent Raster-Noton. Il aura publié entre-temps une demi-douzaine d’albums, sous quelques enseignes réputées (Mille Plateaux, 12K, etc.), avant de faire paraître ce Rhythm sous sa propre bannière. L’homme a ceci de particulier qu’il se produit sur scène au-devant de vidéo et/ou d’images générées par un ordinateur réagissant immédiatement aux impulsions sonores données via les logiciels et séquenceurs utilisés par Bretschneider. On peut ainsi y voir des formes algébriques « pures » (cylindres, courbes, sphères, etc.) subir quantité de déformations structurelles en fonction de la fréquence et du volume du signal sonore impulsé et contrôlé par le musicien. Une certaine façon de rendre visible ce que l’intéressé appelle tout simplement de l’électricité ! C’est au final une musique à la fois mathématique (science que Bretschneider avoue utiliser à tous les stades de son travail) et physique, et en quelque sorte un flux d’énergie qui prend corps. Une dualité qui explique sans doute pourquoi malgré sa constitution numérique, l’électronique de l’Allemand est d’une vibrante et implacable frontalité, en particulier au niveau des basses qui balaient, telle une succession ininterrompue d’ondes sismiques, au travers de toutes les parties du corps de ceux qui s’y confrontent.
Chapitré en neuf tronçons d’inégales longueurs, Rhythm s’apparente davantage à un périple sur une terre désolée et aride en apparence, mais que chaque titre requalifie en une géographie toujours recommencée de mini-oasis éruptives, pulsatiles et tourbillonnantes reliées entre elles par un invisible maillage souterrain. Certains y ont même entendu le spectre d’un sifflement. L’électricité est donc bien une fée.

Yannick Hustache

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