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Critique

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Au moment d’écrire ces lignes, nous nous demandons par où commencer, tant l’existence de ce disque, et donc la subsistance de Mâäk’s Spirit dans le paysage du jazz belge, tient du miracle. Cela fait

Au moment d’écrire ces lignes, nous nous demandons par où commencer, tant l’existence de ce disque, et donc la subsistance de Mâäk’s Spirit dans le paysage du jazz belge, tient du miracle. Cela fait
quelques années en effet que Laurent Blondiau (sauvagement épaulé par les Jeroen Van Herzeele [sax ténor], Jean-Yves Everaet [guitare], Jozef Dumoulin [fender rhodes et électronique] et autre Dominique Massau [tuba]) mène ce groupe comme une hérésie, à contre-courant de toute idéologie musicale dominante, du politiquement correct, de tout polissage.
Après quelques disques et des concerts mémoriaux (certains consistant, à la stupéfaction générale, en une longue improvisation collective de plus d’une heure et d’autres, plus récents, mêlant savamment canevas orchestrés et délires bruitistes), Mâäk’s Spirit, avec ce dernier opus, semble s’être radicalisé.
Bien sûr, des morceaux funk débridés parsèment toujours le disque, avec des lignes mélodiques rythmiquement et mélodiquement complexes, scandées par la trompette et le sax, venant se greffer sur une rythmique énergique et effrénée. Explosant en un bouquet de nerfs, similaire en cela, austérité mise à part, à Aka Moon.
Cependant, le collectif s’ouvre ici à des territoires plus ‘soniques’, où la composition, selon les mots d’Edgard Varèse, est le fait de « l’organisation des sons », avant toute chose.
Nous entrons (notamment avec Datta Error 9) dans un paysage sonore où tout est permis : faire abstraction du corps, du souffle. Tout désapprendre et, vierges devenus, accueillir les sensations. Réorganiser les sons, non plus selon un mode hiérarchique établi, éprouvé, mais à chaque instant de façon nouvelle et trouver, dans cette zone de non-lieu, un espace où s’exprimer justement, où le « dire est un acte encore.
Et ce n’est pas un hasard si deux poètes sont invités à poser leur voix sur deux plages. C’est, comme par exubérance, crier la pertinence du phénomène jazz aujourd’hui, du fondement jazz.
Car, et pour finir, bien que le disque nous emmène tantôt dans des compositions électroacoustiques (et le terme n’est pas usurpé), tantôt dans le jazz moderne, fusion (Masada de John Zorn n’est pas loin), tantôt vers la poésie sonore, il n’en reste pas moins le fait de musiciens issus essentiellement de l’école jazz, reconnus dans ce créneau. Il y a là matière à réflexion et à espoir.
… Et si le jazz, de tout temps, n’avait été qu’un terreau, sur lequel, selon les temps et les lieux, s’épanouissaient des musiques différentes mais complémentaires, répondant chacune à leur manière, et sans que celle-ci soit exclusive, à la réalité d’une époque ?


Maxime Coton

 

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