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Critique

DETAILS NOT RECORDED

publié le

Plus que deux projets solos en marge de leurs groupes respectifs (Hood pour le premier et Piano Magic pour le second), un duo de disques qui transforme les pérégrinations solitaires de leurs auteurs en recueils de vignettes éclairantes pour aller au- […]

 

Plus que deux projets solos en marge de leurs groupes respectifs (Hood pour le premier et Piano Magic pour le second), un duo de disques qui transforme les pérégrinations solitaires de leurs auteurs en recueils de vignettes éclairantes pour aller au-devant de l’obscurité de la saison sombre qui s’annonce.

A y regarder de plus près, en termes de mode de fonctionnement, il faudrait définitivement tordre le coup à cette bonne vieille notion d’entreprise musicale parallèle, et substituer l’image guide de l’arborescence (simplifiée) à cette vision manichéenne d’un tronc carrière principal d’où partiraient parfois quelques initiatives personnelles de moindre importance. Il n’est nul besoin de s’appuyer sur une multitude d’exemples pour étayer l’affirmation que faire partie d’au moins deux groupes ou bien mener au minimum deux projets de front relève de la plus stricte banalité, même pas rock. Dont acte !

Sauf que dans le cas de The Declining Winter se mêle l’incertitude d’encore un jour recevoir des nouvelles d’Hood autrement qu’en termes de souhaits ou de vœux pieux au faible indice de réalisation. Créé à l’aube des années 1990 dans les environs de Leeds (Wetherby pour être exact) par deux frères aux idées encore imprécises (Chris et Richard Adams), Hood va publier une série de disques (6 albums et une kyrielle de singles et maxis) qui est l’une des plus belles leçons - bien que trop méconnue - de work in progress dans une pop qui dès l’origine a clairement délimité son terrain de jeu. Un territoire qui de prime abords ressemble à une lande désolée aux derniers jours d’un automne particulièrement sombre, ou sortant de la torpeur d’un hiver froid tout de lumières réverbérées. Une friche sédimentée de mélancolie new wave mais où poussent, disque après disque, d’irréelles fleurs mélodiques chantées d’une voix blanche au léger feulement (celle de Chris), au sein d’un biotope bruissant d’une multitude d’essences organiques (basse, batterie guitares, mélodica, cordes…) et électroniques (tendance electronica écaillée) finement entrecroisées et auxquelles s’ajouteront sur le tard (les deux ultimes albums) quelques rythmiques sèches héritées de leur amis américains du fabuleux (et feu) collectif hip hop cLOUDDEAD. Mais depuis « Outside Closer » (2005), Hood semble entré dans une phase d’hibernation prolongée et à l’exception de l’album de son ex-leader (« We Know About The Need »en 2007) publié sous le nom de Bracken, c’est le silence radio dans toutes les langues en provenance de cette autre famille Adams.

Paru à la fin 2008 sous l’enseigne The Declining Winter, « Goodbye Minnesota » vient donc briser la glace de l’attente. Le décorum sonore n’a pas fondamentalement varié mais une chape de brouillard hivernal intense recouvre des paysages sonores sur lesquels les voix se font plus rares ou ont changé de statut. Moins plaintif ou plus évanescent que celui de son frère, le chant de Richard semble presque se satisfaire de son unique condition instrumentale et s’efface même complètement pour une bonne moitié des titres. Conçu et réalisé à la maison et entouré d’un staff minimal, « Goodbye Minnesota » est un fragile édifice aux structures aérées, floconneuses ou flottantes qui tient sa force et son unicité de ses infinies façons de décliner ses guitares aux motifs parfois pixelisés (pincées à la Richard Youngs dans « I Used To Read Books », caressées avec gravité dans « Summer Turns to Hurt », en échos difractés dans « The World Is an Idiot »…), comme autant de dérivés d’un même matériau. Bien que privé de pics d’intensité et évitant (de justesse) l’écueil de la monotonie monochrome, cet inaugural album de The Declining Winter traduit, avec l’indispensable profondeur de champ et quelques judicieuses pointes de lumière éparse pour guide, le subtil nuancier d’un sentiment roi (la mélancolie sur le versant isolationniste) en recherche d’une topographie fictive où concrète qui lui serve à la fois de terreau, de refuge et d’itinéraire(s) de sortie. Les couleurs sont un peu passées, le papier jauni et friable au toucher, mais entre les lignes, il reste bien des interstices où l’imagination peut vagabonder en toute liberté.

glen johnsonLeader de Piano Magic (une petite dizaine d’albums au dernier relevé), mais aussi unique tête pensante des Textile Ranch et autres Future Conditional, Glen Johnson sort un premier disque perso un peu déroutant sous sa propre enseigne, dans la mesure où le tout le personnel de son groupe pointe, peu ou prou, son nez dans « Details Not Recorded », ce compris sa chère et tendre Angèle David-Guillou, qui dans son coin mène le projet Klima. Adulé d’un noyau de fans que l’on aimerait plus étoffé, Piano Magic se situe clairement dans le prolongement de la très longue queue de comète d’une pop new wave 100 % britannique, si encline à peupler ses sombres humeurs existentielles d’une multitude d’emprunts et de citations prélevés, avec un naturel confondant, dans chaque sillon du champ culturel élargi (littérature, cinéma, peinture…). En 2001, les Anglais signeront la B.O. d’un film de Bigas Luna (« Son De Mar ») sans devoir changer beaucoup une écriture où les constantes oniriques et cinématiques vont main dans la main. Et pour rester du côté des métaphores propres au grand écran, on pourrait dire que la différence fondamentale entre cet opus solo de Glen Johnson et n’importe quel disque de Piano Magic est du même ordre que celle qui sépare une reconstitution historique pourvue de moyens conséquents, d’une œuvre intimiste. Si les fondamentaux demeurent les mêmes – un chant posé se saisissant de chaque syllabe comme dans une lecture publique, une instrumentation classique, aérée, extrêmement précise et renforcée au besoin (flûte, glockenspiel, mélodica…), le tout immergé dans un terreau électronique aussi ténu que foisonnant – le changement d’échelle se fait sentir à chaque instant. Mais l’homme est rusé et définitivement surprenant ; et plus que l’impression de feuilleter les pages malicieusement illustrées d’un journal intime, on assiste, captivés, aux tendres et délicates perversions que s’afflige un homme pour qui le plaisir s’accompagne toujours d’un zeste tortueux de douleur et de tristesse.
Un détail qui fait toute la différence…


Yannick Hustache

 

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