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Focus

Folk on Film au Cinéma Nova

Folk on Film - Cinema Nova - bandeau - dessin (c) Crumb.jpg
Pendant cinq semaines – de la mi-mai à la mi-juin 2019 – le Cinéma Nova dévoile une lumineuse programmation de projections, de concerts et de conférences liées aux rapports entre cinéma et folk.

Sommaire

À cette occasion, nous nous sommes entretenus avec Guillaume Maupin, musicien (solo, Tartine de clous, jukebox humain), bénévole de longue date du Cinéma Nova et programmateur inspiré de la présente programmation.


3 questions à Guillaume Maupin

- PointCulture : Peux-tu préciser quelle idée du « folk » se retrouve derrière la programmation ?

- Guillaume Maupin :
La dernière fois que j’ai été chez les collecteurs de musiques traditionnelles Claude et Lou Flagel [invités au Cinéma Nova au cours de la programmation dans le cadre de la soirée wallonne du vendredi 24 mai], ils avaient un bac de vinyles qu’ils ont sorti ou auxquels ils ont participé et qu’ils ont en plusieurs exemplaires. Je leur ai acheté un disque du label Ocora consacré à la musique traditionnelle hongroise et intitulé Le Dernier Passage. En rentrant chez moi, je me suis rendu compte que les notes de pochette de Claude et Lou Flagel étaient formidables et que leur texte disait sans doute mieux, et de manière plus concise, ce que j’avais voulu écrire pour le programme papier du Nova :

Hongrie - Le dernier passage - Ocora.jpg

« Les musiciens réunis [sur ce disque] appartiennent à deux mondes bien différents. Le point de rencontre fut la musique, mais avec des approches qui ne sont pas comparables.

D’une part, le maniement d’un moyen d’expression de la communauté à laquelle il appartient permet à un paysan d’asseoir sa position sociale et d’assurer quelques gains supplémentaires. Sa fonction est de répondre aux goûts du public et de jouer son rôle quand la musique fait partie de l’activité du groupe (fêtes, mariages, etc.). Son répertoire comporte le plus grand nombre possible de pièces répondant à la plus large demande (surtout pour la danse).

Au contraire, le jeune musicien citadin en quête de racines culturelles recherche les formes les plus affinées de l’art populaire, les versions les plus anciennes, les plus épurées. Il analyse les traits propres aux différents styles régionaux, le placement des agréments, ports de voix, trilles, pour retrouver l’accent original de chaque mélodie.

L’un s’exprime, les caractéristiques sont intégrées, l’autre imite et s’interroge pour comprendre le pourquoi de ces caractéristiques. Quand la rencontre est fructueuse, l’élève rejoint le maître dans l’exécution d’une musique qui fait partie de la culture comme le langage parlé, expression directe de la sensibilité. Il en résulte un curieux paradoxe : alors que les vieux musiciens jouent et chantent surtout des pièces du nouveau style, ce sont les jeunes qui font la musique la plus archaïque et, pour des instruments disparus ou en voie de disparition, leur maîtrise dépasse souvent celle des derniers joueurs connus.

Cette humble connaissance est l’indispensable base au travail de création qui, appliqué à une musique presque oubliée, peut lui assurer un devenir. C’est hier pour demain.
»
(Claude et Lou Flagel, Le dernier Passage, Ocora 1972)

Il se trouve que ça colle exactement avec ce que j’avais en tête pour cette programmation : parler du « folk » comme mot anglo-saxon pour parler de la musique traditionnelle et de ses différents revivals (dont le revival principal est celui des années 1960-1970 en Europe, faisant suite à celui des États-Unis). Et c’est vrai que c’est le dernier moment où les musiciens traditionnels (j’appelle « musiciens traditionnels » ceux qui sont nés dans une tradition et pour qui faire de la musique traditionnelle n’est pas un choix ; pour eux jouer de la musique, c’était jouer cette musique-là) vont croiser et passer le relais à ceux qui vont suivre (que j’appelle – et que d’autres appellent – « les folkeux », ceux qui font du folk ; des gens qui, à partir de la génération des baby-boomers, ont eu accès, au sein de la société libérale de consommation, à plein de choses mais font le choix de jouer cette musique-là, alors qu’ils auraient pu jouer du jazz, du rock, autre chose).


- PointCulture : Comme on le lira dans le survol ci-dessous, géographiquement la programmation couvre de nombreux pays et régions (Hongrie, Italie, Wallonie, Kabylie, etc.) mais il y a un pays qui est au moins aussi représenté que tous ces autres : les États-Unis – avec, entre autres, une sélection de films de Les Blank qui ponctuent ces cinq semaines de projections et de concerts…

- Guillaume Maupin : La programmation s’intitule Folk on Film et traite donc évidemment des relations entre le folk et le cinéma. Les États-Unis étant ce qu’ils sont au niveau du cinéma, on y a fait beaucoup de films sur le folk. Aussi parce que les Américains sont ce qu’on appelle un « peuple des Lumières », c’est-à-dire un peuple créé après la Révolution, après un grand massacre et une guerre civile, ce qui a demandé de définir ce qu’était ce peuple.

Beaucoup de réflexions ont tourné autour de cette idée de « peuple », de comment le peuple s’exprime. Toute la mythologie hollywoodienne se fond avec la mythologie des musiques populaires. — Guillaume Maupin

Il n’y aura pas de concerts américains au sein de ce premier volet de la programmation mais toute une série de films dont ceux de Les Blank, un documentariste, mort il y a quelques années, qui tournait beaucoup en 16 mm, un peu en cinéma-vérité, à la Pennebaker. À la fin des années 1960, il a fondé sa propre compagnie cinématographique, Flower Films, et, en 1968, a tourné son premier film de cette future série, celui sur le bluesman texan Lightning Hopkins. Au total, on passe sept de ses films.


- PointCulture : Comment avez-vous trouvé tous ces films ? Et toutes ces émissions de télévision, puisqu’on en trouve aussi dans la programmation…

- Guillaume Maupin : Soit j’invitais des musiciens par rapport à un film que j’avais envie de montrer ; soit après avoir invité des musiciens, je leur demandais s’ils pensaient à un film et j’essayais de le visionner.

Il y aura du « grand cinéma » avec les films du nouvel Hollywood (Arthur Penn, Hal Ashby, Walter Hill), les films hongrois (Miklós Jancsó, Pál Zolnay), Farrebique de Georges Rouquier…

Mais aussi des émissions et des reportages de télévision parce que la télé a documenté le folk de façon intéressante : Le Pays des collines (Jacques Vanderheyden, RTB 1975) consacré au folk wallon, Hnifa, une vie brûlée (Ramdane Iftini et Sami Allam, télévision algérienne 2008) et la série d’émissions de Pete Seeger, Rainbow Quest (WNJU-TV, 1965-1966).


Seeger, compagnon de route de Woody Guthrie, un peu plus jeune que lui, mort il n’y a pas si longtemps [2014] et qui est vraiment le passeur ultime entre les différentes générations, était interdit de télévision et de radio pendant le maccarthysme, mais on lui a proposé une émission sur une petite chaine locale du New Jersey qui émettait surtout en espagnol. Il y a eu 39 émissions d’une heure tournées en un an, au cours desquelles il invitait des musiciens, sans script, à jouer des hootenannies, des « bœufs », autour d’une table. Il recevait à la fois des inconnus, des gens en train d’être redécouverts et des stars. On va passer quatre de ces émissions avec, entre autres, Mississippi John Hurt, Roscoe Holcomb, Elizabeth Cotten et Johnny Cash.

Interview et retranscription : Philippe Delvosalle
- entretien réalisé au cours de l'émission MU sur Radio Campus -



Émission radio

Intégralité de l'interview : 1h20 de radio avec extraits musicaux, à partir de la 36e minute de l'émission


Coups de cœur dans la programmation / soirées spéciales


Vendredi 17 mai 2019 - soirée "La Tarentelle cachée"

avec le film La Taranta (Ginafranco Mingozzi, 1962)
et concert de La Pizzica nascosta (Mario Salvi et Rafaelle Insera)



Vendredi 24 mai 2009 - soirée Folk in French #1 : Wallonie

avec une conférence musicale de Claude Flagel
et Le Pays des collines (Jacques Vanderheyden, RTB 1975)


Samedi 25 mai 2009 - Voix et chansons kabyles

avec une concert de Tighri Uzar ("la voix des racines")
et Hnifa, une vie brûlée (Ramdane Iftini et Sami Allam, 2008)


Jeudi 30 mai 2009 - soirée Folk in French #2 : France (et Québec)

avec une conférence musicale de Guillaume Veillet
et une compilation de courts métrages


Samedi 15 juin 2009 - revival folk hongrois

avec un concert du Ferenc Sebö Trio
et Fotografia (Pál Zolnay, 1972)


Programme complet

Folk on Film : 5 semaines de programmation

Du jeudi 16 mai au dimanche 16 juin 2019

Cinéma Nova
3 rue d'Arenberg
1000 Bruxelles