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Critique

ROME DÉSOLÉE

publié le

L’aventure masculine d’une errance homosexuelle dans Rome, dite en voix off, au plus près des images, au bon vouloir du spectateur. Réalisme littéraire des textes, phrases, mots, paroles qui captent, calment le temps qui passe. Road movie entre la […]

L’aventure masculine d’une errance homosexuelle dans Rome, dite en voix off, au plus près des images, au bon vouloir du spectateur. Réalisme littéraire des textes, phrases, mots, paroles qui captent, calment le temps qui passe. Road movie entre la voix, le spectateur et ce qui lui est donné à voir. Rome. La nuit. Enfermé dans la gare Termini avec les clochards, les routards, le personnel d’entretien. Insomnie. Rencontre sexuelle fortuite, sans plaisir, sans amour, sans suite… Plans fixes qui capturent la vie furtive d’humains en attente. La voix obsédante. Émissions d’actualités. Écran neigeux. Publicités pour produits de consommation, entrecoupées d’images CNN de la guerre du Golfe. Des militaires, des aviateurs très jeunes, dans des poses viriles à côté d’avions de combat. Retour à la quotidienneté d’une grande cité, à la voix et à sa vision expressionniste d’une vie telle qu’elle va. Pluie de nuit sur la façade mal éclairée d’un hôtel où, peut-être, le narrateur reçoit un inconnu pour une vaine étreinte qu’il oubliera… L’autre considéré comme un bien de consommation. Couloir aux couleurs sales. Une silhouette en suspens semble venir vers la caméra. Eau grise sur les pavés en clair-obscur. Voyage à travers Rome filmée par la vitre avant d’un taxi. Images floues de visages croisés, vies indistinctes qui se côtoient sans se reconnaître. « Sensa casa » affiche une toile pendue à la fenêtre borgne d’une maison vide. Visite à la clinique où un ami séjourne, volontairement, chez les « fous ». Impossible rapprochement malgré une sensibilité commune. Recherche désolée d’amour à partager, loin des rencontres insatisfaisantes avec des fantômes malheureux. Rome désolée. Façades lépreuses, poubelles, impasses aux néons fatigués… Chair triste, vagabondage misérable des corps, assuétude d’un manque plus fort que la mauvaise héroïne qui, consommée en désespoir de cause, est l’appel d’un anéantissement qui ne vient pas. Pub. Extraits de films. Dessins animés. Tracer son destin dans Rome. Discrétion des solitaires qui se cherchent, se rencontrent, et se donnent. Clichés non-esthétiques. Voyage à travers la douleur morale et les ruines, la décrépitude. La maladie des pierres accompagne celle des coeurs, la mort au bout du chemin ?
Orage et averses. Tonnerre. Bombardement «chirurgical» de Bagdad. Fondu au blanc sale. « Sono un essere umano, non una bestia» peut-on lire sur une caravane à l’abandon. Fix, drogue qui envahit le sang, sang qui se met à couler, plus vite, plus fort… sans rémission. La violence devient sa monnaie d’échange. Berlusconi à la TV. Des parasites envahissent son visage qui devient méconnaissable. Netteté de l’image revenue. Une ligne racle l’écran comme la lame d’un couteau. Feu Berlusconi! Pasolini est cité à travers l’évocation des « ragazzi » de Rome. Amour. Recherche d’amour: « Dis-moi Enzo, je t’aime ? Dis-moi que tu seras toujours là ! » Rembobinage rapide de la bande vidéo qui scarifie la scène d’ornières aveuglantes.
« Personne ne manque plus d’amour qu’un homosexuel à Rome. » Plan fixe : un mendiant assis, un handicapé appuyé contre lui, corps renversé, bouche bée, pietà lugubre. Les deux ne font qu’un, deux torses, bras serrés autour d’épaules, contre épaules, deux têtes…. Symbole d’une amitié fusionnelle rayonnante, d’amour peut-être ? Le couple se sépare, les deux corps se lèvent, s’étirent, reprennent possession de leur espace, pieds, jambes séparés, debout, en marche…
Plan inoubliable, troublant. Rome, années 80. Musique de Corelli.

Complément DVD : conférence, un peu longuette, de Vincent Dieutre à la Cinémathèque française sur le « tricks » - rencontre sexuelle passagère - et le cinéma (75’).
Traite du thème de la rencontre sexuelle non tarifée et sans suite, entre deux inconnus(es).

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