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Critique

MADWORLD - Wii

publié le

Vous pensez que la console de Nintendo est seulement la chasse gardée du grand public? Ravalez vos certitudes et tendez les bras à ce titre qui vous donnera l’occasion de faire jaillir des geysers d’hémoglobine. Aux confluents de l’esthétique d’un Sin […]

Après un No More Heroes très violent (quoiqu’amputé de ses gerbes de sang en Europe), la Wii voit arriver dans son catalogue un jeu débordant de plaisirs sadiques qui fera très certainement date dans l’histoire du secteur vidéoludique. En effet, MadWorld marque par son contenu politiquement très incorrect mais aussi parce qu’il arrose une imagerie «bon enfant» de la console de Nintendo de gore et autres tripes bien dégoulinantes. Il n’y a pas à dire, ce genre de sortie risque de ne pas être du goût de tout le monde, à commencer par les détracteurs du jeu vidéo qui y voient là un monde du divertissement vulgaire qui fait l’apologie de vices variés.

  Chainsaw Massacre 

Vous incarnez Jack, personnage très charismatique à la musculature surdéveloppée, dont la mission principale est de survivre à un jeu télévisé morbide qui se déroule dans une zone urbaine mise en quarantaine. À la différence des autres beat’em all (1), MadWorld s’affranchit d’un postulat pour le moins audacieux: sous les gerbes de sang et les effluves gore, se cache une belle dénonciation des règles débiles de la téléréalité, de la manipulation financière et de la paranoïa du terrorisme. Et la condamnation d’une société déshumanisée et sombre se fera à coup de tronçonneuse rétractable, de décapitations, d’arrachage de membres… Chaque coup porté à vos ennemis sera une bonne occasion à saisir pour peindre votre écran d’une couleur rouge foncé. Les développeurs ont d’ailleurs poussé le vice jusqu’à juxtaposer une esthétique bichrome qui lorgne sur les Comics (2) de Sin City (saga créée par Frank Miller) avec la réalité des mises à mort: l’esthétique en noir et blanc omniprésente accentue l’horreur visuelle et c’est voulu… Dans les faits, le résultat n’est pas à mettre en toutes les mains: mots d’oiseaux, viscères à foison, ambiance bien glauque qui flirte avec le sadomasochisme, etc. Le titre de l’éditeur SEGA tranche dans le lard et exploite tous les outils qu’il a à sa disposition pour créer la polémique, quoique le contenu soit souvent tiré dans le second degré et on ne pense pas dès lors que l’ensemble artistique doit être traduit comme une œuvre à prendre au sérieux.


La première chose qui frappe dans ce jeu, c’est son emballage graphique décidément très à la mode en ce moment: après les Viewtiful Joe, Okami et Killer7, le procédé continue de nous émerveiller par sa finesse, ses contours travaillés et son obsession du travail bien fait. Comme en témoigne le très beau niveau du casino qui fourmille de détails, on sent immédiatement que les concepteurs sont parvenus à retirer la substantifique moelle de la console de salon la moins puissante de cette génération. Et ce caractère plastique singulier ne nous déplaît pas: des quatorze niveaux que vous avalerez d’une traite (comptez six heures pour tout boucler, oui c’est peu), vous verrez des univers fortement inspirés par des références cinématographiques à commencer par des gares madworlddésaffectées, un casino flamboyant, des temples japonais… L’ensemble est étudié de telle façon que l’ennui visuel ne 1s’installe pas et vous oblige à étriper la horde d’ennemis en piochant dans votre imagination. Car à l’inverse de bon nombre de titres qui exigent de la part du joueur qu’il nettoie un environnement infesté de créatures belliqueuses, MadWorld vous incitera à pulvériser les scores en redoublant d’ingéniosité dans la façon dont vous vous y prendrez à torturer vos adversaires: pas question donc de se contenter à trancher menu avec votre tronçonneuse, il faut exploiter les infrastructures des environnements visités pour les transformer en outils de torture. Entre des panneaux de signalisation qui transperceront la boîte crânienne, les trains lancés à deux cent à l’heure qui écraseront des individus qui auront le malheur de se trouver coincés sur les voies, les réacteurs d’avions ou encore des sortes de grosses pointes métalliques attendant patiemment d’empaler le premier venu, notre Jack n’aura que l’embarras du choix pour satisfaire ses pulsions morbides. D’ailleurs, quasiment tout ce qui arrive dans les mains de ce motard bodybuildé est tué, concassé, écrasé et réduit en miettes. La réalisation, très inspirée par la démesure d’effets techniques chers aux productions télévisuelles américaines, met continuellement en valeur notre colosse en sublimant les exécutions presque insoutenables comme ce moment où Jack extirpe le cœur de la cage thoracique d’un malheureux pour ensuite le pulvériser de sa main droite, tout ça sous les yeux de la victime! Nous nous garderons bien de délivrer les délices que renferme le jeu au risque d’enlever le plaisir de la découverte mais sachez que les idées ne manqueront pas de vous interpeller… Plus que jamais, ce titre est réservé à un public averti et plus encore que n’importe quel média estampillé « 18+ », il pulvérise les lois établies pour aller très (très) loin dans l’explicite. Vous voilà prévenus.

Attardons-nous un peu sur la maniabilité, celle-ci est bien pensée car elle s’avère dès le début de l’aventure instinctive et naturelle. Le jeu exploite le duo Nunchuk/Wiimote sous tous les angles: du simple geste de droite à gauche pour exprimer à l’écran un coup de tronçonneuse latéral jusqu’à secouer le Nunchuk comme un dératé afin de cogner son adversaire contre des murs aux ornements hétéroclites, vous disposez d’une large panoplie de coups qui répondront à vos instincts les plus sombres. À noter aussi que le titre contient énormément d’actions contextuelles à réaliser. Par contextuel, il faut comprendre qu’il est exigé de presser des boutons dans un temps imparti pour espérer mettre un point d’orgue à la mise à mort. Mais rassurez-vous, dès le début de votre périple, votre patron vous expliquera clairement les méthodes qu’il faut adopter pour pouvoir maximiser vos chances de réussites, qu’elles soient financières ou dans un but de faire exploser l’audimat…

Jusqu’ici, nous avons exposé une teneur sombre au parfum de chair, mais MadWorld hisse heureusement sa démesure glauque au même niveau que son humour. Et là, on peut dire que l’on est servi comme ces fameux mini-jeux qui ponctuent idéalement l’aventure en y injectant une dose de folie bienvenue. Avant de se prêter au délire, les Bloodbath Challenges (les challenges de bain de sang en anglais) nous sont introduits par l’immanquable Baron Noir et sa délicieuse assistante bien sadique qui ne manquera pas l’occasion de le massacrer à la fin de ses présentations. Dès que les règles du jeu sont assimilées, vous pourrez vous lâcher en valdinguant des grappes d’ennemis dans un réacteur d’avion, les foutre dans des bidons de feux d’artifice bourrés de poudre noire, jouer aux fléchettes ou encore les pousser dans un compacteur géant… Tout est bon pour rendre la mort belle et jouissive. Et vos performances sanguinolentes seront rythmées par le biais d’une bande-son influencée par le hip-hop/rock/horror-core du plus bel effet. Quant aux commentaires en français, ils sont fleuris, mais ils deviendront difficilement supportables sur la longue durée. Nous ne saurons que trop vous conseiller d’opter pour la piste anglaise.

Mis à part ses quelques couacs techniques comme des ralentissements perceptibles une fois que l’écran est bourré de cadavres et d’une caméra capricieuse, il est difficile de ne pas trouver son bonheur en jouant à MadWorld. Plus encore qu’un pavé jeté dans la mare, le titre de Platinum Games s’amuse à se nourrir des défaillances de nos sociétés pour livrer un résultat d’une hallucinante violence qui pourrait presque renvoyer la série des Manhunt et Grand Theft Auto au rang de contes Disney. En clair, si vous rêvez de trucider votre patron qui transforme votre travail en supplice moral ou que vous râlez à la réception d’une amende pour excès de vitesse, pas de soucis, nous avons la solution pour canaliser vos envies de meurtre: jouez à ce titre, ça vous fera du bien et surtout, ça ne fera de mal à personne.
Nasser Ouafrassi

 

 

(1) De l’anglais « battez-les tous » est un genre de jeu vidéo opposant un ou plusieurs joueurs à un nombre important d’adversaires. Le but étant de tous les tuer et d’atteindre des scores très élevés.

(2) Le Comic est un terme généralement utilisé aux États-Unis pour désigner une bande dessinée. Citons parmi les Comics cultes des noms comme Superman, Batman, Hulk…

 

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