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Critique

WORRISOME HEART

publié le

Internet bruisse de petits billets admiratifs à l’égard de Melody Gardot, unanimes sur sa suavité renversante, sa mélancolie surnaturelle pour une telle jeunette et remixant tous les mêmes éléments biographiques (bribes de légende en évidence dans le […]

Internet bruisse de petits billets admiratifs à l’égard de Melody Gardot, unanimes sur sa suavité renversante, sa mélancolie surnaturelle pour une telle jeunette et remixant tous les mêmes éléments biographiques (bribes de légende en évidence dans le dossier de presse ?) : la demoiselle de 22 ans aime surtout la musique qui adoucit, simple, sans problème. Un peu d’épaisseur est fourni par la claque qui déclique sa vocation et sa carrière : un crash à vélo, des séquelles et un toubib qui lui recommande la musique pour tenter de réparer certaines lésions cérébrales. La musique de son nouvel album est le fruit de cette thérapie.
Des chansons, des compositions pour reconstruire sa mémoire, empêcher ses souvenirs les plus proches de fuir, de s’éparpiller.
Qu’ai-je fait ce matin, qu’ai-je mangé à midi ?
Tiens qu’est-ce que j’ai écrit comme chanson il y a cinq minutes, ne suis-je pas en train de recommencer la même ?
Et très probablement qu’il y a là une angoisse qui ajoute un je-ne-sais-quoi aux chansons et styles si lisses. Un léger soupçon de gouffre. On compare sa voix à celle de Norah Jones. C’est vrai qu’elle chante à merveille. Lascive, inspirée, lumineuse, avec un zeste branchouille dans l’archi-simplicité même (c’est plus apparent dans le clip). Très blues. Pour elle, le blues est surtout une question de profonde tristesse déphasée et de feeling. Elle l’a, alors. L’orchestre derrière n’a fondamentalement rien d’original, piano, guitare, batterie feutrée, trompette bouchée, ourlet voluptueux de saxophone, relents psychés de l’Hammond, tout est disposé avec soin, avec goût, avec une grâce fatiguée bien étudiée et puis tout, rigoureusement, reste à sa place en virevoltant souplement. Comme pour ne pas dérouter un aveugle qui se repère sur l’emplacement enregistré des objets sonores qui le guident dans la nuit, dans sa peine. Melody Gardot distille à intervalles irréguliers, d’intenses petites perles bleues, lumineuses. Juste parfois une accélération scintillante, un (dés)équilibre subtil.

Pierre Hemptinne

 

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