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La première collaboration entre Ryoji Ikeda et Carsten Nicolai remonte à une dizaine d’années déjà. Depuis lors, les deux musiciens ontsuivi des chemins parallèles, explorant les associations possibles entre leur travail sonore et leur travail visuel. […]

 

 

 

 

La première collaboration entre Ryoji Ikeda et Carsten Nicolai remonte à une dizaine d’années déjà. Depuis lors, les deux musiciens ontsuivi des chemins parallèles, explorant les associations possibles entre leur travail sonore et leur travail visuel. Tous deux y développent des concordances entre électronique minimale et graphisme. Carsten Nicolai, qui est également graphiste, a ainsi récemment publié deux livres qui peuvent apporter un éclairage supplémentaire à ses disques. Quoiqu’éminemment spécialisés, et destinés avant tout à des professionnels du design, ces deux ouvrages appellent irrésistiblement la comparaison avec sa production sous le nom d’Alva-noto comme sous celui d’Aleph. The grid index et the moiré index sont des dictionnaires visuels, consacrés l’un aux grilles et aux structures à motifs répétitifs, l’autre aux effets de moiré qui naissent de la superposition de ces motifs. Ces deux techniques forment la base des vidéos que Nicolai utilise en concert, mais également en partie, de ses méthodes de composition. Ryoiji Ikeda est lui aussi obsédé par les figures mathématiques et a, comme Nicolai, très souvent utilisé comme sources sonores des données informatiques, code-barres, fichiers image traduits en fichiers son, glitches, etc.

Le présent disque est une étape supplémentaire dans leurs recherches; ils ne se contentent plus ici d’associer le mode du son et celui de l’image, mais produisent une série de pièces sonores composées de manière à provoquer une réponse visuelle lorsqu’elles sont analysées par un appareillage sophistiqué d’analyse spectroscopique. Heureusement pour le commun des mortels qui ne disposerait pas de matériel de monitoring de l’image stéréo, le disque se suffit à lui-même, alignant une série de morceaux aux rythmiques infernales, basés sur l’entrecroisement implacable de pulsations tonales et d’échardes de bruit blanc. S’il sonne a priori comme une antique salle de téléscripteurs, crépitant des sonorités croisées de dizaines d’imprimantes matricielles, cet entrelacs se révèle rapidement plus subtil qu’il n’y paraît, formant un entremêlement rythmique syncopé, complexe et toutefois irrésistible.

Afin de préserver l’équation entre les sons et leur équivalent visuel (toujours pour les heureux possesseurs d’un spectrographe domestique), ces morceaux ont volontairement été laissés tels quels, sans mastering, ce qui procure à l’album un côté brut, presque brutal, étonnant pour ce genre de sonorités et ce type de répertoire. À l’heure où l’on commence à reconnaître les écoles et les studios de masterisation (voire par exemple l’insistance avec laquelle on signale – à juste titre – le travail de Rashad Becker pour Dubplates & Mastering à Berlin), décider de passer outre ce stade de la production d’un disque est un geste qui illustre bien le refus de compromis de ce projet. Mais, par-delà ses aspects technologiques et conceptuels, ce nouvel album de cyclo est avant tout étonnamment musical, oscillant entre une techno minimaliste et hypnotique et des rythmiques brisées d’une redoutable efficacité.

Benoit Deuxant

 

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