Compte Search Menu

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies permettant d’améliorer le contenu de notre site, la réalisation de statistiques de visites, le choix de vos préférences et/ou la gestion de votre compte utilisateur. En savoir plus

Accepter
Focus

NOVA XX

NOVA XX
Créatrices, artistes et scientifiques : les femmes sont à l’honneur pour ce nouveau forum dédié à l’innovation à l’aune de la quatrième révolution industrielle. Du 09 au 30 décembre 2017 à Bruxelles.

Sommaire

Une grande part du combat féministe est de donner aux autres femmes la liberté de faire des choix que l'on n'aurait pas forcément fait pour soi. — Lena Dunham

Contexte : start-uppeuses, créatrices d'entreprises

La photo a fait le tour des médias, pas seulement des réseaux sociaux. Ciel bleu, la tour Eiffel à l’arrière-plan. Quatorze jeunes femmes en jeans et chemiser blanc prennent la pose. Elles ne sont pas mannequins mais n'en assument pas moins avec le sourire leur rôle de modèles, rendant à ce terme toute sa dignité. Réunies devant l’objectif par Delphine Remy-Boutang, fondatrice de la Journée de la Femme Digitale, on les appelle des start-uppeuses, ce mot barbare pour désigner le fait qu’elles ont créé leur entreprise. Cette photo a néanmoins quelque chose de surprenant, c’est qu’elle ne provient pas d’un magazine féminin. Son statut est un peu particulier… La presse économique, qu'elle prend à partie, n’aurait jamais pensé l'inclure dans ses pages sans la publication d’une première photo sur laquelle on peut voir, radieux, la main en visière, une dizaine d’hommes, en jeans et chemises blanches, devant la tour Eiffel. Cette image-là, publiée par la revue Capital dans le but de mettre en avant l’avenir entrepreneurial français a bien entendu motivé la seconde, la version féminine. Une riposte.

Les anecdotes illustrant le peu de crédit que l’on accorde aux femmes dans les affaires sont légions. Pensez à ces entrepreneuses américaines qui, dans le but d’obtenir des fonds, ont dû s’inventer un co-fondateur masculin. L’histoire a elle aussi alimenté les débats sur les réseaux sociaux. Force est de constater que le milieu du travail reflète les discriminations en vigueur dans la société et qu’en matière d’investissement, le partage de la confiance est loin d’être égalitaire entre les hommes et les femmes.

Cependant, on le voit encore aujourd’hui, une parole qui se libère, en particulier sur les réseaux sociaux, peut prêter le flanc à la critique et ne pas constituer, pour certains, un argumentaire convaincant. Tandis que les chiffres ont toute l’éloquence nécessaire : inégalités de salaire, de représentativité, de pouvoir, dans les métiers de l’art comme ailleurs : la liste couvre l’ensemble de la société. Ces chiffres, Stéphanie Pécourt, directrice des Halles Saint-Géry, les avait bien en tête au moment de la (rapide) mise sur pied de NOVA XX. Convaincue de l’efficacité d’une action positive, cette sociologue de formation inaugure cette année à Bruxelles un premier Forum dédié à l’Innovation technologique, scientifique et artistique en mode féminin et à l’aune de la Quatrième révolution industrielle / 4.0.

Cercle vertueux

NOVA XX Alexandra Dementieva@Alexandra Dementieva

Tout au long du mois de décembre, seize personnalités issues des domaines croisés de la science, de la technologie et de la création artistique sont invitées à se présenter ainsi que de lever un pan de voile sur leur travail, passionnant et complexe. D'une grande générosité (précisons que l'événement est gratuit), le programme comprend une soirée de performances animée par les Garages numériques, quatre conférences thématiques, sept présentations de start-up et une exposition collective regroupant neuf artistes bruxelloises et européennes. À ce beau projet conçu par la directrice des Halles Saint-Géry avec l’aide de Juliette Bibasse, active dans le monde de la création numérique, on se sent presque au regret d’avoir sous les yeux cette étiquette XX, comme si le genre des invitées avait quelque chose à dire sur leur travail. On sait très bien que les forums à la composition strictement masculine s’abstiennent de mettre leur « genre » en exergue puisque celui-ci se pense représentatif d’une norme. Dans une société qui reproduit les inégalités de façon systémique, les femmes ne doivent pas attendre qu’on leur permette d'occuper la place qui leur revient. D'ores et déjà leur implication est nettement moins marginale que sous-estimée. Par conséquent, il leur revient de construire leurs propres réseaux d’influence et de visibilité. Créer un cercle vertueux au sein duquel les modèles proposés, telles les figures mises en avant par le travail des associations féministes et portés par la dynamique propre des espaces partagés et des incubateurs d’industries créatives dans l’émergence d’initiatives transversales, c’est, tout simplement, agir en vue de susciter des vocations. Chaque nouveau talent qui voit le jour contribue à sa manière à changer les mentalités jusqu’à ce que le genre perde enfin sa charge discriminatoire. Dans ce contexte, l’organisation d’un tel forum reste une forme d’activisme bien douce certes, mais des plus convaincantes.

Innovation et interdisciplinarité

NOVA XX Anne Marie Maes@ Anne-Marie Maes

En ligne directe avec ce positionnement féministe, l’innovation est le mot d’ordre de Stéphanie Décourt et de Juliette Bibasse. Sous ses formes les plus plastiques, celles qui donneront le plus de plaisir aux non spécialistes, et qui s'avèrent également les plus opérantes, l’innovation plaide pour une façon de remettre l'art au centre de la recherche. L’incroyable vigueur du champ des nouvelles technologies ne repose-t-elle pas sur le décloisonnement des disciplines ? Voulant apporter son soutien à cette conduite, NOVA XX tient à favoriser les rencontres entre acteurs de champs complémentaires et par là, à contribuer aux investissements transversaux.

À découvrir l’univers des artistes invitées, l’impression qu’on en retire est que le Beau et l’Utile n’ont plus à se livrer bataille alors que l’art moderne et contemporain vient d’ouvrir un tout nouveau chapitre, aussi conflictuel que prolifique, dans le dialogue entre l’art et les techniques, dialogue qui, du reste, n’a jamais cessé de s’écrire de l’Antiquité à la Renaissance en passant par les recherches des impressionnistes sur la lumière. Nombreuses sont les artistes qui font valoir leur formation de scientifique dans leur imaginaire. Venues des quatre coins d’Europe, les invitées du NOVA XX ne se contentent pas de fournir la preuve de leur expertise dans un domaine précis (microbiologie, ingénierie, électronique, informatique, etc), leurs propositions dépassent de loin ce qu’on peut attendre de l’offre actuelle en art contemporain. Réagissant au contact de la main, les œuvres en béton polysensoriel de Milène Guermont émettent des sons qui répondent au champ magnétique propre à la personne qui les effleure. Certains travaux de l’artiste trouvent leur application dans l’architecture urbaine et dans l’aménagement du paysage. Au croisement de la microbiologie, de l’écologie et de la technologie, dans la sphère dite du biomimétisme, Anne-Marie Maes réalise des tissus inspirés de l’organisation des abeilles, mais aussi des levures et des bactéries. À la fascination que nous inspire ces histoires de chair, de béton et d'ondes électriques s’ajoutent alors l’émotion qui naît à la vue de ces peaux presque translucides, fragiles et intelligentes, offertes à des usages pour la plupart non encore élucidés. D’autres propositions émanant d’Alexandra Dementieva, Claire Williams, Lynn Pook, Lea Rogliano et bien d’autres encore ont toutes de quoi nous interpeler. Quant au volet business, incarné par les start-up NextRide, Sharify, Façon Jacmin et Pyke, s’ils nous surprennent un peu moins étant au nombre de celles dont on peut quotidiennement lire le récit dans les journaux, elles n’en sont pas moins révélatrices de l’ampleur d’un mouvement qu’on peine à se représenter dans toute son envergure. Enfin, pour ouvrir grand cette fenêtre découpée sur le paysage infini de l’innovation, des questions d’ordre éthique et philosophique seront déployées lors d’un cycle de conférences réparties entre Bozar, ESA Saint-Luc, le Campus des Arts et Métiers et Be Central. Avec ses points de vue diversifiés, NOVA XX, on l’espère, saura réunir professionnels et curieux, citoyens engagés et amateurs d’art autour de ces enjeux de société fondamentaux que réveillent les nouvelles technologies.

Catherine De Poortere


NOVA XX
Du 09 au 30 décembre 2017
Soirée de performances le 09 décembre aux Halles Saint-Géry
Lien internet et programme

Complément d'informations sur le thème des inégalités entre hommes et femmes sur le marché du travail, une émission passionnante à écouter sur France Culture : L'économie du genre (2) - L'inégalité au travail (dans un cycle de 4 émissions à suivre sur la même chaîne).

Classé dans

En lien