Préambule - Ce sentiment de l’été, film de Mikhaël Hers sorti en 2015, s’ouvre sur le travail d’une jeune femme dans un atelier de sérigraphie (berlinois). En une brève succession de tableaux, on découvre une calme routine, une succession de gestes précis mais peu spectaculaires. La lumière qui se déverse par les grandes fenêtres, la grâce de mouvements conditionnés par des machines et des matériaux lourds et volumineux, qui remontant des doigts, des poignets jusqu’aux bras, se répand dans le dos pour enfin s’exprimer dans le corps tout entier épousent sans effort le magnétisme contenu de toute activité manuelle lorsqu’on la regarde d’un peu plus près. Avec ses lacunes évidentes venant gommer les aspects moins séduisants ou peut-être simplement trop techniques, la scène offre une image accueillante et sereine d’un métier somme toute assez secret eu égard à l’abondante production qu’il génère. Si les gravures et les estampes doivent leur existence à la volonté de rendre l’art plus accessible, et donc à leur nature pléthorique, les ateliers restent pour le plus grand nombre des endroits ignorés, mystérieux.

Il faut dire que les arts imprimés, dénominations qui recouvre diverses techniques allant, au sens le plus strict, de la gravure en creux pour arriver aujourd’hui à l’impression numérique en passant par la lithographie et la sérigraphie, la linogravure, la xylographie ou plus couramment l’estampe, mettent en jeu des moyens assez lourds – plus lourds que ceux qu’exigent la peinture ou la photographie) réclamant la mise en place de structures qui les supportent.

Est-ce parce que de tels lieux restent assez rares que l’Atelier circulaire, centre d’une taille impressionnante situé dans le quartier du Mile End à Montréal, endosse à lui seul tous les rôles liés à la production et à la conservation de gravures anciennes et contemporaines ? À moins que la juxtaposition de divers ateliers connectés à une galerie ne soit en ce domaine qu’une possible traduction de la nécessité de donner aux artistes les moyens de travailler en toute quiétude. Enseigner, accompagner, fournir les outils, exposer, stimuler la recherche : autant de missions complémentaires qui, reliées les unes aux autres, constituent un agencement cohérent et dynamique. Pour parfaire le tableau, un magasin de matériel spécialisé vient encore conforter l’idée un peu régressive peut-être, mais tellement réjouissante, que l’artiste qui souhaiterait exercer son métier en autarcie, trouverait là tout le nécessaire à portée de main. Et pas que lui d’ailleurs, mais aussi les amateurs. Ces derniers ont en effet tout le loisir de venir s’initier, s’ils le souhaitent, aux diverses techniques des arts imprimés ou de suivre, par des conférences ou des expositions, les développements inattendus qui, dans ce domaine particulier comme en général pour toutes les formes de production artistique, empruntent désormais les voies du numérique au croisement des arts, des sciences et des technologies

Si, parce que celui-ci nous est plus proche géographiquement, le projet rappelle celui du Centre de la gravure et de l'image imprimée à La Louvière, il faut néanmoins lui reconnaître une ambition et surtout des moyens à la mesure d’un plus grand pays. Le rapprochement toutefois n’est pas sans pertinence puisque l’un comme l’autre ont vu le jour dans les années 1980. C’est à un petit groupe d’artistes, québécois comme de juste, que l’Atelier circulaire doit son existence. Aussi, après plus de trente ans d’activité, trois déménagements et une extension continue de son spectre d’activité, on ne peut que saluer l’initiative d’avoir voulu contribuer à préserver les arts imprimés de la dilution dans un paysage qui tend à confondre, par la similarité des techniques mises en œuvre, visuels et images, icônes et clichés.

Catherine De Poortere

photos: ateliercirculaire.org

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Atelier circulaire
5445, av. de Gaspé 
Locaux #105 & 517
Montréal (Québec)
Canada  H2T 3B2