Dès l'hiver 1642-1643, "Polyeucte" suscite des réactions diverses. Si pour certains, "cette tragédie réussit bien", d'autres lui reprochent son "christianisme". Polyeucte fut en effet un martyr, au IVème siècle, à Mélitène, en Arménie. Mais l'histoire de ce saint n'est pour Corneille qu'un point de départ. Le thème central de cette tragédie est l'ascension de l'amour vers un objet toujours plus parfait. L'amour de Polyeucte pour sa femme, sacrifié à son amour de Dieu, l'amour de Pauline pour Sévère, pour Polyeucte puis envers Dieu seul, et l'amour de Sévère pour Pauline forment un même élan vers l'absolu. La force qui pousse les protagonistes à se renier eux-mêmes, à connaître l'extase, semble animer aussi le style cornélien, superbe de concision et de clarté.