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Playlist

Trad-giques, les traditionnels dramatiques

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Octobre mourant. Novembre, neuve ombre, longue et sombre. Temps de frousse ou tant de frissons. Le Samain dans sa main blanche, elle perd l’amour, pour plaire à la mort. Rouge sang. Suspends ton chant. Pleure, rossignolet sanguinolent ! Petit tracé des traditionnels tragiques transmis tout à trac.

Sommaire

Les chansons populaires traditionnelles traduisent le plus souvent une histoire réelle, colportée de personnes à personnes, de villages en villages, de villes en villes, au-delà des pays, au-delà du temps.

Elles racontent les amours, le travail, les difficultés, la famille, la guerre, la mort... la vie somme toute.

Au cœur d'un processus permanent lié à la transmission orale, elles voyagent et se nourrissent de nouvelles paroles, d'autres couplets, d'une fin plus heureuse ou d'un dénouement tragique. Les lieux leur font acquérir des prénoms, des animaux, des endroits naturels et des termes locaux. À ces chansons anciennes, le temps modifie les paramètres : la langue s'actualise et le milieu se transforme. Le chevalier sera capitaine, le fusil remplacera le couteau et l'usine succédera aux champs.

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Alors, puisque tout change, que reste-t-il de ces chansons originelles ? L'émotion et les sentiments, les thèmes éternels, les leçons transmises ? Sans doute un peu de tout cela mais aussi l'empreinte intemporelle de moments de vie qui se perpétue dans les chansons actuelles.

Et puis la musique. Celle qui nous pousse à danser, qui nous rapproche physiquement de l'autre, qui rythme les loisirs mais aussi le travail. L'air joyeux et sautillant qui nous prend au corps ou la douce complainte qui nous serre le cœur et parfois soutire un sanglot. Les mélodies traditionnelles françaises (et aussi wallonnes, suisses, québécoises...) jouissent d'une structure modale qui a évolué, elle aussi, en fonction des apports locaux, des arrangements dus aux interprètes et des adaptations instrumentales.

La chanson traditionnelle francophone est aussi une forme de poésie. Et comme toute poésie, elle porte l’empreinte du milieu et de la période où elle a été élaborée. Cette empreinte se manifeste dans les formules, les tournures et le vocabulaire. Au-delà de la forme, la thématique est éternelle, les émois et les tourments demeurent identiques. — Jean-François Dutertre

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Le fait divers a toujours suscité de l'émoi. Plus il est sordide, plus il a des chances de marquer les esprits et les mémoires, que ce soit au Moyen Âge ou actuellement. Preuve en est le succès des magazines dédiés à ce type d'informations.

Closer, Enquêtes criminelles, Le Nouveau Détective, ou Histoires vraies ! fourmillent de titres aussi sinistres que macabres :

« Son mari décède, elle se suicide ! » – « Pour plaire à sa mère, il tue sa bien-aimée. » – « Trois jeunes violent et tuent une jeune fille. » – « Elle empoisonne son mari ! »

Eh bien, ne vous déplaise, ces horribles faits ne datent pas d'aujourd'hui. Ils sont narrés dans les ballades de jadis, qui remplissaient la même fonction que le journalisme populaire actuel.

Vous voilà prévenus ! En route pour les traditionnels dramatiques, tristes et parfois insupportables.

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Dame Lombarde

Voici l'horrible histoire d'une femme qui empoisonne son mari avec un serpent vert plongé dans une pinte de vin rouge. « Le serpent verde », titre d'une autre version de cette chanson, donne une clef de compréhension sur les raisons de cet empoisonnent. Séduite par le fils d'un prince, elle craint la réaction de son époux et suit le conseil du galant.

Le serpent vert, sans doute une vipère, évoque à la fois le serpent sacré de la capitale lombarde (1) et le conte merveilleux de Goethe (2). Le serpent évidemment suggère ici la mort et le péché. Notons que la vipère, introduite dans le vin, n'est pas mortelle. Elle se noie, libère son venin et composerait ainsi un remède curatif contre les rhumatismes.

Popularisée par le groupe Malicorne, la version ci-dessous est celle du premier album de Pierre Bensusan, virtuose de la guitare acoustique, en 1975.

Dame Lombarde

- Allons au bois Dame Lombarde, allons au bois; (Bis)
Nous trouverons le serpent verde, nous le tuerons. (Bis)

Dans une pinte de vin rouge, nous le mettrons, (Bis)
Quand ton mari viendra de chasse grand soif aura. (Bis)

- Tire du vin, Dame Lombarde, tire du vin. (Bis)
- Et par ma foi mon ami Pierre, il n'y a de tiré. (Bis)

L'enfant du bré, jamais ne parle a bien parlé, (Bis)
- Ne buvez pas de ça mon père, vous en mourrez. (Bis)

- Buvez-en vous dame Lombarde, buvez-en vous (Bis)
- Et par ma foi, mon ami Pierre, n'ai point de soif. (Bis)

Elle n'a pas bu demi-verre, s'est renversée, (Bis)
Elle n'a pas bu le plein verre, a trépassé. (Bis)

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Le roi Renaud / Quand Jean Renaud de guerre revint

Longtemps, on s'est demandé qui pouvait être ce roi Renaud. Prince français, ancien seigneur, illustre chevalier... ? Ce qui est certain, c'est que ce thème, répandu en France, en Suisse, au Québec et en Wallonie, était déjà chanté au XVIe siècle et que son origine plutôt nordique semble remonter au XIIIe siècle (3). L'histoire de Jean Renaud est assez émouvante : ce chevalier revient chez lui, blessé, et agonise devant sa mère, priant que sa femme ne l'entende pas...

La chanson a connu plus de cinquante versions différentes (4) et des interprètes tels qu'Édith Piaf, Cora Vaucaire, Pierre Bensusan, Malicorne ou Yves Montand. La version rare ci-dessous est celle du groupe namurois Baden Skiffle, en 1979.

Quand Jean Renaud de guerre revint

Quand Jean Renaud de guerre revint
Portant ses tripes entre ses mains
Sa mère, à la fenêtre en haut,
Voit revenir son fils Renaud.

- Réjouis-toi Renaud mon fils,
Ta femme vient d’avoir un fils.
- Ni de ma femme, ni de mon fils
Mon cœur ne peut se réjouir.

Car voyez ma mère, voyez ma mie,
Comme un vilain m’a arrangé
En repassant près d’un fossé,
À moitié mort, il m’a laissé.


Et je sens la mort qui me transit.
Portez-moi vite dedans mon lit,
Mais portez-moi si bas, si bas
Que ma femme ne l’entende pas.

Et quand ce fut sur la minuit,
Le Jean Renaud rendit l’esprit.
Toutes les gens ont soupiré,
Les paysans en ont pleuré.

- Mais dites-moi ma mère et ma mie
Ce que cette tombe-là signifie.
- Ma fille, je ne puis plus vous le cacher :
C’est Jean Renaud qui est décédé.

- Alors, dites vite au fossoyeux
Qu’il fasse une tombe pour nous deux
Et que le trou soit assez grand
Pour qu’on y mette aussi l’enfant.

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Le tueur de femmes

Encore un Renaud. Mais celui-ci est un tueur en série, "digne" des plus sinistres Halloweens. Nommé aussi The Outlandish Knight outre-Manche, ce chevalier bizarre et de surcroît goujat a déjà assassiné treize femmes et s'apprête à noyer la quatorzième dans la rivière, "la mer coulante". Mais la belle est futée et ne s'en laisse pas compter.

Vraisemblablement d'origine française (Paris-Metz), cette histoire recourt au même décor que "Le galant noyé" (ou la dame suivant les versions), autre drame dans lequel le personnage tombe à l'eau par amour pour y chercher l'anneau, symbole de la fidélité et de l'alliance du couple.

En 1992, sur son disque consacré aux ballades françaises, Jean-François Dutertre (5) interprète, avec délicatesse, cette chanson funeste à l'épinette des Vosges (6).

Le tueur de femmes

"Allons, la belle, nous promener,
En attendant le déjeuner.
Allons, la belle, allons-y donc:
'Y a du plaisir nous promenant."

Ils ne furent pas à mi-chemin:
"Mon Dieu, Renaud, que j'ai grand faim!"
"Mangez, la belle, votre main,
Jamais ne mangerez de pain."

Ils ne furent pas au bord du bois:
"Mon Dieu, Renaud, que j'ai grand soif!"
"Buvez, la belle, votre sang,
Jamais ne boirez de vin blanc."

Et quand la belle fut promenée,
Elle demanda-t-à se loger.
Tu logeras dans le vivier,
Ou j'ai sept femmes de noyées."

Et quand ils furent au bord du vivier,
Lui dit de se déshabiller:
La belle ôta son blanc jupon
Pour aller voir la mer à fond.

"C'est pas à toi, franc chevalier,
De voir ta mie déshabiller.
Mets ton épée dessous tes pieds
Et tourne-toi vers le vivier."

Elle l'a pris, l'a embrassé,
Dans la rivière elle l'a jeté:
"Pêche, Renaud, pêche poisson;
Si tu y en prends, en mangerons!"

Quand le beau galant fut à l'eau,
Il se raccroche à une branche;
La belle tira son grand couteau,
Coupa la branche au ras des flots.

"Voici les clefs de mon château;
La belle, je vous les donnerez."
"Je m'soucie autant de tes clefs
Que je me soucie de toi*."

"La belle, qui vous ramenera
Vers le château de votre père?"
"Le cheval qui nous amena
Bien doucement m'y ramenera."

"Mais que diront tous vos parents
De vous voir revenir seulette?"
"Je leur dirai la vérité;
Que tu as voulu me noyer!"

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Complainte de la blanche biche

Marguerite est la dame du château. Hélas pour elle, elle est femme le jour et la nuit blanche biche. Et c'est là son malheur, car son frère chasse à la tombée du jour...

La métamorphose est un thème qui traverse l'histoire de l'humanité. Les anciens croyaient que les dieux et certains humains pouvaient se changer en élément de la nature. La légende de la gatte d'or, qui, de femme, se transforme en chèvre, reste encore bien vivace à Vieuxville, en Wallonie. Et nos contes récents parlent encore d'êtres humains qui se changeraient en loups ou en chauves-souris.

Le Moyen Âge se joue de ces transformations dans les chansons de métamorphoses, où les interprètes plaisantent en se substituant à des plantes, des animaux, des êtres humains... afin de se piéger réciproquement.

Dans un registre plus fantastique, la "Complainte de la blanche biche" évoque à la fois le crime fratricide, l'inceste et... l'anthropophagie.

Popularisée par Tri Yann, la "Blanche biche" a été interprétée par de nombreux artistes : Guy Béart, Malicorne, Keltia et, dans la vidéo ci-dessous, la Suissesse Laurence Vevey, dans une version lumineuse et sobre.

Complainte de la blanche biche

Celles qui vont au bois c'est la mère et la fille
La mère va chantant et sa fille soupire
"Qu'a vous à soupirer ma blanche Marguerite"
"J'ai bien trop d'ire en moi et n'ose vous le dire"

"Je suis fille le jour et la nuit blanche biche
La chasse est après moi des barons et des princes"
"Et mon frère Renaud qui est encore le pire
Allez ma mère, allez, bien promptement lui dire"

"Qu'il arrête ses chiens jusqu'à demain midi
Où sont tes chiens Renaud, et la chasse gentille"
"Ils sont dedans le bois, à courre blanche biche"
"Arrête les Renaud, arrête je t'en prie"

Trois fois les a cornés, de son cornet de cuivre
À la troisième fois, la blanche biche est prise
Mandons le dépouilleur, qu'il dépouille la biche
Celui qui la dépouille dit "Je ne sais que dire"

Elle a le cheveu blond et le sein d'une fille
A tiré son couteau, en quartiers il l'a mise
En on fait un dîner aux barons et aux princes
"Nous voici tous sied, hors ma sœur Marguerite"

"Vous n'avez qu'à manger, suis la première assise
Ma tête est dans le plat et mon cœur aux chevilles"
"Mon sang est répandu par toute la cuisine
Et sur vos noirs charbons mes pauvres os s'y grillent"

Celles qui vont au bois c'est la mère et la fille
La mère va chantant et la fille soupire
"Qu'a vous à soupirer ma blanche Marguerite"
"J'ai bien trop d'ire en moi et n'ose vous le dire"

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Nous sommes trois frères

Au Moyen Âge, l'apport de la famille joue un rôle important dans la décision de se marier. Mais ces trois frères choisissent bien mal l'époux de leur sœur Jeanne. Ce dernier la bat tant et tant que les trois frères ne la reconnaissent plus au premier abord. Ils se mettent à chercher le mari qui s'est caché...

Appelée aussi "La Mal-mariée vengée", cette chanson sautillante aborde hélas encore la violence faite aux femmes. Dans une version plus ancienne (8), le mari soumet la mariée à toutes sortes de cruautés et jette son tout jeune fils pour nourrir les chiens.

Cette version heureusement plus édulcorée ressemble à un "mélange de Barbe-Bleue et de Cendrillon" (9) très visuel. On se représente bien les trois cents chambres, que n'auraient pas méprisées Stanley Kubrick ou Tim Burton.

Têtes de chien est un quintette masculin qui interprète les chansons traditionnelles a capella : cinq "frères" qui chantent "Nous sommes trois frères".

Nous sommes trois frères

Nous sommes trois frères
Rien qu’une sœur à marier
Marions la belle
Marions-la bien à son gré

Lui donnent un homme
Trois fois du jour il la battait
Battre sur battre
Ah que le sang n’en rigolait

Mon ami Jacques
J’ai ma chemise aller laver
Vas-y vilaine
Mais prends bien garde de t’arrêter

Mon ami Jacques
J’ai vu venir trois cavaliers
Qu' ont la ressemblance
De mes trois frères de l’armée

Ho ma mie Jeanne
Où donc que j’va m’aller cacher
Dans les trois cents chambres
Qui se ferment à trois cents clefs

Bonjour servante
Où est la dame du château
Je n’suis pas servante
Je suis la dame du château

Ô ma sœur Jeanne
Où donc est passée ta beauté
Le vilain homme
A tout pillé, tout balayé

Ô ma sœur Jeanne
Dis-nous où donc est ton mari
Il est en guerre
Puisse-t-il n’en jamais revenir

Ô ma sœur Jeanne
Nous voulons aller promener
Dans les trois cents chambres
Qui se ferment à trois cents clefs

Dans la première
Les trois frères n’ont rien trouvé
Mais dans la seconde
Ils ont entendu soupirer

Tirent leur épée
Et coup sur coup lui ont donné
Frappez mes frères
Tant que vous le verrez bouger

Ô ma sœur Jeanne
Où donc allons-nous le jeter
Mais par la fenêtre
Il tombera dans le fossé

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L'Écolier assassin

Les « écoliers », au Moyen Âge, désignent des jeunes hommes, la plupart à partir de seize ans, qui étudiaient à l'université. Il fallait être riche pour suivre les cours : le coût d'un livre manuscrit, par exemple, équivalait à un troupeau. Pour continuer ses études et sans doute s'amuser, on peut comprendre que l'écolier de la chanson soit demandeur de plus de ressources financières et de considération de la part de ses pairs – certainement la "chemise blanche" qu'évoque la chanson.

Cet étudiant, dont la relation avec sa mère est assez ambiguë, choisit de lui rapporter le cœur de son amoureuse, alors que le chasseur dans Blanche-Neige avait finalement renoncé à commettre cet acte horrible.

Chaque strophe présente une gradation dans l'horreur qui ne peut aboutir qu'à un épilogue tout aussi dramatique : tout cela pour rien, ne restent que le regret incommensurable et la mort.

La tension dramatique des paroles est accentuée par le refrain "J'entends la chanson sereine du rossignolet joli ", tout en délicatesse et sérénité, en total contre-pied avec la violence du récit. L'interprétation du groupe Malicorne accroît le malaise par un arrangement subtil : d'abord une introduction obsédante à la guitare et au clavier, une mélodie toute en nuances appuyée par Gabriel Yacoub et, en contraste, la voix éthérée de Marie Sauvet, qui se joint au chant dans le refrain. Les ponts musicaux joués aux cordes apportent encore plus, s'il le fallait encore, d'inquiétude et de frissons.

La vidéo que voici reprend le succès de Malicorne lors de leur ultime concert, dans la formation originale en 2010.

L'écolier assassin

D'où reviens-tu mon fils Jacques, d'où reviens-tu cette nuit?
Je viens des écoles, ma mère, des écoles de Paris
J'entends la chanson sereine du rossignolet joli

Tu as menti là, mon drôle, tu reviens de voir ta mie
Je voudrais la voir morte et avoir son cœur ici
J'entends la chanson sereine du rossignolet joli

Que donneriez-vous ma mère si je la faisais mourir?
Je donnerais chemise blanche, de l'argent à ton plaisir
J'entends la chanson sereine du rossignolet joli

Il est allé voir sa belle sitôt le soleil levé
En arrivant à sa porte, l'entendit minuit sonner
J'entends la chanson sereine du rossignolet joli

Il la prend par sa main blanche, au jardin l'a emmenée
Il a pris sa claire épée, le petit doigt lui a coupé
J'entends la chanson sereine du rossignolet joli

Ah! Mon Dieu que de souffrances que j'endure cette nuit
Tu en souffriras bien d'autres avant qu' la nuit soit finie
J'entends la chanson sereine du rossignolet joli

Il la couche sur l'épine, oh, qui graine sans fleurir
Lui a pris le cœur du ventre, dans sa chemise il l'a mis
J'entends la chanson sereine du rossignolet joli

Tenez, ma cruelle mère, voilà le cœur de ma mie
Tu as menti par ta bouche, c'est le cœur d'une brebis
J'entends la chanson sereine du rossignolet joli

Oh! Montagnes sur montagnes, écrasez-vous sur mon corps
J'ai fait mourir ma maîtresse, je ne mérite que la mort
J'entends la chanson sereine du rossignolet joli

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Trois garçons bien habillés

La voix particulière et reconnaissable de Gabriel Yacoub (Malicorne) avec celle concordante de Sylvie Berger (La Bergère) se relaient dans l'interprétation de cette histoire criminelle. Trois jeunes "bien comme il faut" détroussent et tuent une jeune femme dans un bois. Puis ils s'en vont festoyer dans la maison de la mère de la victime, avant que celle-ci ne découvre leur crime.

Éric Montbel (Le Grand Rouge), est un ethnomusicologue et un musicien doué qui joue de la cornemuse, des flûtes, du saxophone... Dans "Trois garçons bien habillés", il est à la clarinette. C'est lui qui a réalisé Le Jardin des mystères (11), un album réunissant des chanteurs et des musiciens de talent autour de complaintes et ballades effrayantes, fantastiques et inquiétantes, dont le titre de la vidéo qui suit.

Trois garçons bien habillés

C’est trois garçons bien habillés
Le long d’un bois se reposaient
Asseyons-nous donc là à l’ombre
En attendant que la chaleur tombe

Le plus jeune garçon des trois
S’est allé promené dans le bois
Dans son chemin a fait rencontre
D’une tant jolie fille blonde

Il lui a demandé où elle allait
Il lui a demandé ce qu’elle portait
Mais je m’en vais devers chez ma tante
Porter des bagues et des diamantes

Tu vas me donner bagues et diamantes
Aussi ton beau collier d’argent
Oh penez-les je vous les donne
Laissez-moi libre de ma personne

Ta personne nous la voulons
Bagues et diamants nous les prendrons
Il s l’ont frappée à coups de lance
La pauvre fille tombe sanglante

Sont bien restés jusqu’à minuit
Dedans le bois sans en sortir
Ils s’en vont tout droit à la porte
Du logis de la fille morte

Ouvrez ouvrez la porte ouvrez
Qu’y a-t-il donc pour le souper
Oh il y a perdrix bécasses
Que vous faut-il donc davantage

Ils n’avaient pas moitié soupé
L’hôtesse est venue pour compter
En tirant l’argent de sa bourse
Un beau diamant est tombé rouge

L’hôtesse se trouvait tout près
Le beau diamant a ramassé
Ca c’est le diamant de ma fille
Trouvez-la moi morte ou en vie

Le plus jeune a tout déclaré
Hélas Madame nous l’avons tuée
Nous l’avons tuée dans ce passage
Nous l’avons mise sous les feuillages

Ils furent jugés et condamnés
A être tous écartelés
Sur la grand place de la ville
Pour avoir tué cette pauvre fille

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La Pernette

La Pernette, la Périnette ou Jeannette, suivant les versions, en a gros sur le cœur : elle est amoureuse de Pierre. Mais celui-ci est en prison. Et lorsqu'on lui apprend qu'il sera pendu, elle souhaite être pendue, elle aussi.

Bien qu'aussi triste que "Jean Renaud de guerre revint", cette histoire dramatique est devenue un succès des chansons enfantines et scoutes. Dans les années 1970, les enfants reprenaient gaiement en chœur "Ne pleure pas Jeannette" sans se douter de l'atrocité du récit – le mot pendouiller occulte la réalité de la pendaison.

Le groupe de La Corogne (en Galice, Espagne) reprend plus sobrement et avec douceur une de ces versions.

La Pernette

La Pernette se lève
Trois heures avant le jour
Tralalala Traha lalala
Elle prend sa quenouillette
Avec son petit tour (3X)

À chaque tour qui vire
Fait un soupir d’amour
Tralalala Traha lalala
Sa mère vient lui dire
- Pernette qu’avez-vous ? (3X)

- Avons le mal de tête
Ou bien le mal d’amour ?
Tralalala Traha lalala
- N’ai pas le mal de tête
Mais bien le mal d’amour (3X)

- Ne pleure pas Pernette,
Nous te marierons
Tralalala Traha lalala
Te donnerons un prince
Ou le fils d’un baron (3X)

- Je ne veux pas un prince
Ni le fils d’un baron
Tralalala Traha lalala
Je veux mon ami Pierre
Qu’était dans la prison (3X)

- Tu n’auras mie Pierre
Nous le pendolerons
Tralalala Traha lalala
- Si vous pendolez Pierre
Pendolez-moi itou (3x)

Au chemin de Saint Jacques
Enterrez-nous tous deux
Tralalala Traha lalala
Couvrez Pierre de roses
Et moi, de mille fleurs (3x)

Les pèlerins qui passent
En prendront quelques bouts
Tralalala Traha lalala
Diront : « Dieu, ayez l’âme
Des pauvres amoureux
Même pour l’amour d’un autre
Ils sont morts tous les deux.

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(1) La dondaine est un carreau d'arbalète, un projectile apparenté à une flèche.

(2) Le biscione, serpent mythologique est le symbole sacré de Milan, chef-lieu de la Lombardie.

(3) Le Serpent vert (Das Märchen) est un conte merveilleux de Goethe en 1795, qui met en scène une jeune fille qui ne peut être touchée sans provoquer la mort.

(4) Voir l'article de Georges Doncieux sur le site Persée.fr

(5) Différentes versions, consulter ce site

(6) Jean-François Dutertre (1948-2017) était l'un des fondateurs du groupe folk Mélusine et un ethnomusicologue qui a travaillé au rapprochement entre les musiques traditionnelles et actuelles. Il jouait de l'épinette des Vosges et de la vielle à roue.

(7) L'épinette des Vosges est un instrument d'environ 50 cm de long, de 3 à 8 cordes. Avec la main droite, on peut les pincer, les frapper d'un petit bâton, les balayer de la main ou utiliser un archet.

(8) Voir les paroles de la version plus sordide sur ce site.

(9) Eric Montbel sur le site consacré au Jardin des mystères.

(10) Lire l'article de PointCulture concernant la reformation de Malicorne et l'article à propos de "L'Écolier assassin".

(11) Retrouver les informations à propos de cet albums sur le site d'Eric Montbel.

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