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Critique

Tanya Tagaq - Retribution

Tanya Tagaq (photo de Nadya Kwandibens)

femme, chant de gorge, inuit, Canada, Tanya Tagaq, musiciennes, viol

publié le par Yannick Hustache

Un nouvel album de la chanteuse Inuit

Son précédent album, Animism (2014) lui avait valu quelques distinctions dans son pays d’origine, le Canada. Retribution, cinquième effort de la chanteuse de gorge Tanya Tagaq est hanté tout entier par cette abjecte et (?) universelle meurtrissure qu’est le viol. Violence faite à la chair, à l’être (à la femme, à l’enfant…) mais aussi à la Terre, à ces territoires sacrés peu à peu arrachés à son peuple (les Inuits), au bénéfice d’une exploitation minière extensive. Et quoi de plus logique aussi pour cette musicienne qui travaille son background musical au corps d’une modernité frontale et insoumise (on verrait bien en elle une septentrionale cousine de Mike Patton tant ses emprunts synthétiques, rock ou hip hop se fondent dans une patine sonore toujours radicale et sur-expressive), de conclure son disque sur une reprise un poil « modifiée » de feu Nirvana (« Rape Me ») en mode trip hop « trickyen » et boréal. Ailleurs (« Nacreous ») les sons et raclements de gorge mêlés de feulements incantatoires ou extatiques rappellent ce que les drones electro d’aujourd’hui doivent aux gorges des peuplades premières. Avec ses percussions marmoréennes sur fond de salissures industrielles, « Aorta » est un véritable exorcisme de l’ère 2.0. Logiquement pointé au milieu du disque, « Centre » est un reliquat trip hop (coucou Martina Topley-Bird) idéal pour danser en syncope autour d’un feu de la Saint-Jean. À la suite, « Summoning » est un enchantement inintelligible mais articulé autour de sons et de souffles qui disent toute la douleur inexprimée d’un corps-souffrance, tandis que « Rétribution » ou « Cold» (et le court « Sivulivinivut » qui le suit) tiennent davantage du récit mythologique mutique. Et « Sulfur » est encore une nouvelle offrande au souffle et à la respiration comme principes premiers du vivant!

Implacable et « sous-cutané », ce Retribution est à l’égal du film de Kiyoshi Kurosawa, d’un enchantement malsain mais ô combien attirant et salvateur !

Yannick Hustache