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Critique

Des branches déjà s'envole la fleur maigre

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Cinéma belge, Belgique, immigration, Borinage, charbonnage, italien, Migrer

publié le par Michaël Avenia

Longtemps resté invisible aux yeux du public, le film maudit de Paul Meyer démontre pourtant aujourd’hui encore toute l’universalité de son message.
Des branches déjà s'envole la fleur maigre / Et moi j'attends / la patience de son vol irrévocable. — Salvatore Quasimodo

À l’origine, Déjà s’envole la fleur maigre devait répondre à une commande du ministère de l’Instruction publique qui voulait donner une image positive de l’intégration migratoire des Italiens venus travailler dans les mines. Mais après quelques semaines passées dans le Borinage à côtoyer la misère ambiante, Paul Meyer détournera cet outil de propagande pour lui assigner une fonction plus sociale, plus humaine surtout. Sorti peu de temps après la grande grève qui toucha durement le Borinage, le film ne sera projeté que brièvement sur les écrans, retiré de l’affiche par les pouvoirs publics qui voyaient d’un mauvais œil ce qu’ils interprétaient comme un possible outil d’agitation des foules. En outre, ils feront payer très cher à Paul Meyer sa trahison.

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Et pourtant le film n’atteindra sans doute jamais son but, celui de sensibiliser la population belge à la situation de ces travailleurs immigrés. La misère et le déracinement trouvent un écho dans l’aridité du paysage borain où l’espoir un rien tragique est rythmé par le sempiternel refrain « Borinage, charbonnage, chômage ». Mais sous ses aspects de film néoréaliste à la volonté documentaire, Déjà s’envole la fleur maigre défend surtout une certaine nostalgie, un spleen quasi baudelairien où la poésie picturale des compositions de Paul Meyer émerveille tout en laissant dans son sillage une amertume toute naturelle.

Déjà s’envole la fleur maigre n’est en rien un film politique. Mais plutôt une chronique discrète et percutante du quotidien d’anonymes, du cheminement délicat de l’enfance sur les pentes arides qui mènent à la perte de l’innocence. Omniprésents, les terrils troquent leur vulgaire rôle d'amas de débris pour celui de promontoire plus noble où passé, présent et avenir incertain se répondent ; les enfants dévalent les pentes de ces monts artificiellement érigés par les générations précédentes, s’amusant innocemment du travail pénible d’autres déracinés.

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La nostalgie prégnante de l’œuvre s'efface imperceptiblement face à l'évidente misère que vivent les familles italiennes. Et si le film de Paul Meyer évoque une immigration et une situation d’une autre époque, nul doute que les problèmes humains, eux, restent hélas cruellement d’actualité.

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