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Playlist

Anvers en musiques

Anvers en musiques - The Color Grey
À l’étranger, comme en Belgique, l’expression « la scène anversoise » semble uniquement devoir désigner une dizaine d’années de rock à guitares débutant en 1993 avec le premier single de Deus. C’est passer à côté d’une vie culturelle fertile, active depuis le XVIème siècle et qui n’a jamais cessé de fournir des artistes brillants et atypiques dans un paysage musical extrêmement large traversant le jazz, le hip hop, le folk et les expérimentations de tous styles.

Sommaire

L'Anvers du rap

Depuis une poignée d’années, les médias généralistes ne tarissent plus d’éloges à propos d’un certain « rap belge ». Alors que Roméo Elvis, Damso ou autres Hamza, brillent jusque sur les plateaux de télé et les scènes de France, on parle peu de la scène hip-hop anversoise qui pourtant regorge d’artistes tout aussi talentueux. 

Woodie Smalls alias Sylvestre Salumu (originaire en réalité de Sint-Niklaas) signe un très bon premier album chez Sony en 2015. Largement influencé par la clique californienne Odd Future et notamment Tyler, the Creator, le rappeur impressionne par son accent américain et des productions boom bap très abouties.


La chanteuse et MC Coely Mbuena mélange habilement sur son premier LP Different Waters rap, funk, soul et R&B, album sur lequel elle collabore avec un autre anversois, Dvtch Norris.



Jeune chanteur-rappeur-compositeur  belgo-congolais, Will Michiels (aka TheColorGrey) signe en 2017 un premier album très personnel sur lequel il mélange hip-hop,  soul, jazz,  r&b et pop urbaine.  [IK]


Anvers, années 1990 : autour de dEUS

Au sein de la petite histoire du rock belge, l’avènement des Anversois de dEUS dans la première moitié des années 1990 annonce le début d’une plus grande visibilité internationale. Fondé en 1991 autour de Tom Barman (chant), dEUS fonctionne davantage comme un collectif que comme un groupe au sens restreint du terme. Prenant ses marques aux quatre coins d’un firmament rock/pop éminemment personnel (qui va de Bowie à Zappa, de Pere Ubu au Velvet Underground), dEUS y adjoint une bonne dose de liberté formelle héritée du jazz, tout en faisant preuve d’une indéniable appétence pour la mélodie qui tape l’incruste dans les oreilles.

Mais rapidement, le noyau initial du groupe se fissure et génère quantité de formations parallèles ayant pour trait commun un goût prononcé des idiomes musicaux bâtards et délocalisés. Ainsi Stef Kamil Carlens avec Moondog Jr rapidement rebaptisé Zita Swoon, colore son rock bluesy de sonorités issues de la sono mondiale (et afro-cubaines en particulier), et le pique de quelques déhanchements disco, avant de s’essayer à la langue de Molière ! Plus prolixe encore, le pourtant très discret Rudy Trouvé, qui possède son propre label-maison (Heavenhotel) sur lequel il enregistre sous de multiples déclinaisons, des disques illustrés de ses propres peintures : (RT Sextet, Gore Slut, Lionell Horrowitz…). Au sein de Dead Man Ray (trois excellents albums entre 1998 et 2002), il travaille avec Daan Stuyven, qui mène depuis une carrière solo riche d’une douzaine de disques, entre (electro) pop tranquille et B.O. instrumentales pour le cinéma. Au sein très free Kiss My Jazz, Trouvé collabore une première fois avec Mauro Pawlowski le temps de 4 plaques à la fin des années 1990, puis le retrouve au sein du quasi improvisé The Love Substitutes (1994-1996). Showman hors-pair bien que fort dispersé, Mauro, après avoir contribué au déjanté Evil Superstars (1992-1998) aux côté de Tim Vanhamel (Millionaire), poursuit un nombre pléthorique de projets (dont Mitsoobishy Jacson), finit par intégrer dEUS en 2005, sans complétement laisser tomber ses activités annexes !

Quelque peu à l’ombre de cette incestueuse famille, mais pas totalement détaché d’elle, on n’oubliera pas de mentionner quelques électrons libres pop sympas (les très ‘90s Fence ou encore les versatiles Das Pop), ou le duo noise hardcore résilient Vandal X (11 disques depuis 1994) ! (YH)


Ultra Eczema / Dennis Tyfus

Du son sur tes tartines :Belgium UndergroundDepuis ses débuts en 1997, avec une série de fanzine punk, Ultra eczema est une structure incontournable dans le paysage de l’underground anversois. Monté par Dennis Tyfus, artiste protéiforme, plasticien, musicien, curateur, animateur de radio (sur Radio Centraal), le label a à son actif près de 150 publications comprenant des disques couvrant un large spectre de la création musicale locale et internationale ainsi que des livres d’art, des magazines, etc. Egalement numérotés au catalogue se trouvent un site web, une équipe de football et un tatouage. Dennis tyfus réalise également, sous son nom ou sous le pseudo de Vom Grill des performances dadaïstes et anarchiques. (BD) 



Orphan Fairytale

Derrière ce nom trompeusement innocent se dissimule la musicienne Eva Van Deuren qui pratique depuis plus de dix ans une électronique lo-fi et bricoleuse. Construite de bric et de broc à partir de claviers, de jouets, de boucles, sa musique serpente entre new-age, minimalisme, ambient et psychédélisme. Orphan Fairytale façonne un monde chimérique et lunaire, tout en mélodies biscornues et en clochettes tintinnabulantes. Ses œuvres ont été publiées par des labels cultes comme Ultra Eczema, Blackest Rainbow, Aguirre, Audiobot, Beniffer Editions et Sloow Tapes.  [BD]



JJ Funhouse

Fondé par deux ex-étudiantes en graphisme, Jozefien Gruyaert et Joke Leonare, JJ Funhouse est un label et un studio de graphisme anversois. Leurs activités comprennent des publications en tout genre, des t-shirts et l’organisation d'événements. Le musicien Milan Warmoeskerken (avec qui Joke forme le duo Mittland och Leo) a ensuite rejoint la structure, qui publie des cassettes et des vinyles au design soigné et au contenu extrêmement pertinent. On peut y trouver Milan W, Dsr Line, Roger 3000 ou encore des rééditions étranges comme les œuvres pour casio de Gust De Meyer.  [BD]


Dirk Serries

Actif depuis le milieu des années 1980, le musicien anversois Dirk Serries a tout d'abord commencé sa carrière sous le pseudonyme de Vidna Obmana, un projet s'inspirant par moments de la musique industrielle et lorgnant vers des sonorités dark ambient dont les différentes sorties étaient le plus souvent liées à la scène cassette DIY de l'époque. Par la suite sous le patronyme de Fear Falls Burning, Serries se concentra sur des sons à la fois metal et bruitistes proches de drones souvent hypnotiques. C'est finalement sous son propre nom que ces productions prendront une direction plus minimaliste voire silencieuse. Des climats créés à partir de sons de guitare complètement transfigurés par un minimum d'effets et qui l'amèneront par la suite à travailler pour la télévision et le milieu de l'art contemporain. En studio Dirk Serries explore constamment de nouveaux horizons musicaux à l'instar de son dernier album, le très spectral Epitaph sorti sur l'excellent label gantois Consouling Sounds[DM]


Fred Van Hove et la scène improvisée

En mai 1968, à Brème, l’octet de Peter Brötzmann enregistre l’album Machine Gun, un disque qui à l’image de son titre et du dessin de sa pochette va mitrailler les fondations du jazz européen et faire découvrir une nouvelle génération de musiciens frondeurs, lyriques, engagés et enragés. À côté des deux batteurs, deux contrebassistes et trois saxophonistes de cette sorte de double quatuor international, un Belge : le pianiste anversois Fred Van Hove. En 1972, Fred Van Hove et le saxophoniste Cel Overberghe, tous deux nés en 1937, refusent de jouer à l’affiche du festival Middelheim de leur cité natale en protestation au cachet nettement moins élevé que celui des musiciens internationaux qu’on leur propose et, en opposition, créent le Free Music Festival. La même année, sur Vogel, le label local du critique et écrivain Edmond Devoghelaere ils sortent un LP en duo, enregistré à Schelle (entre Willebroek et Anvers) où ils dialoguent – par enregistrements de field recording interposés – avec les cloches de l’église Saint-Charles-Borommée, les marteaux-piqueurs des travaux de construction du pré-métro anversois et des sons de conversation et de flipper dans un café de la ville.  [PD]

Concert solo de Fred Van Hove en 1971, un an avant de claquer la porte du Jazz Middelheim :

Karel Goeyvaerts : une abstraction habitée

D’abord attiré par l’expressionnisme rythmique de Bartok ou Stravinsky, Karel Goeyvaerts se tourne vers le pointillisme d’Anton Webern et le sérialisme d’Olivier Messiaen pour atteindre la fibre essentielle du phénomène sonore et une expression musicale davantage épurée. A ses yeux, la série dodécaphonique en soi ne représente pas la finalité musicale mais plutôt une modalité spatio-temporelle traversée par un souffle spirituel. Il est, dans ce sens, fasciné par l’ars nova du 14ème siècle qui a su intégrer l’inspiration religieuse à un cadre rythmique et  structurel élaboré ; la Sonate pour deux pianos, n°1, qu’il interprète à Darmstadt en duo avec son ami Stockhausen, exprime, par l’abstraction de son écriture, une radicalité qui marquera les esprits, même si le sérialisme n’y est pas encore vraiment total. Il faut en effet attendre son Concerto pour 13 instruments no 2 (1951) pour trouver un langage sériel sans concession qui rattrape en rigueur celui  de Milton Babitt ou de Pierre Boulez.

À l’instar de Stockhausen, l’anversois Karel Goeyvaerts s’affirme comme pionnier de la musique électronique, exploitant de ce nouveau matériau les nouvelles possibilités d’articulation structurelle et surtout un son sinusoïdal que l’absence d’harmoniques préserve des résonances trop terrestres. (Compositions no 4, 5 & 7 pour bandes). Les studios de l’IPEM à Gand et du NordWest Deutscher Studio de Cologne seront ses terrains d’expérimentation privilégiés.

 Dès les années 1960 et durant plus d’une décennie, en phase avec une défiance généralisée envers un sérialisme trop rigoriste,  Goeyvaerts abandonne le contrôle absolu sur les processus de création et intègre l’aléatoire et l’improvisation (Zomerspelen pour groupe de trois orchestres, 1961). En explorant la dynamique entre son électronique et instrument traditionnel,  il renonce aussi à une homogénéité de matériau qui valorisait les combinaisons abstraites (Stuk voor piano, 1964).

Après cette recherche expérimentale, il laissera l’abstraction pour un langage davantage incantatoire qui par ses répétitions et son minimalisme contredit la technique sérielle sans jamais cependant l’évacuer vraiment. (Aquarius 1983-1993)

Si, dans l’intention musicale comme dans son mode d’expression, Goeyvaerts semble en constante recherche d’intégrité, jamais il ne pratique l’exclusion. Toutes les voies qu’il a pu explorer n’ont fait qu’élargir sa cartographie musicale, mais contrairement à ceux qui se perdent dans tant de libertés, il a su rester à la verticale de son étoile.  [JL]



Wannes Van de Velde

Né en 1937 dans la Zirkstraat (une des vieilles rues du schipperskwartier), dans une « famille chantante », d’un père métallurgiste et d’une mère couturière, Wannes Van de Velde s’intéressa très tôt à la chanson populaire, de Flandre mais aussi par exemple au flamenco. Marqué par les humiliations du service militaire, le chansonnier écrit ses premières séries de chansons de la fin des années 1960 dans sa langue, le dialecte anversois, en fustigeant l’urbanisme spéculateur et irrespectueux qui démolissait le vieux centre d’Anvers à l’époque (la chanson « Lied van de Antwerpse urbanisatie » sur un de ses premiers LP). Ne négligeant en rien l’intérêt pour la question de la langue (« 't Is Vlaams, 't trekt op geen kloten », chanson sur l’ostracisme anti-patois de la bourgeoisie flamande bien-pensante), Van de Velde incorpora parfois subtilement dans sa musique des éléments de musique savante qui nuancent ou complexifient son image de collecteur et archéologue des musiques folkloriques.  Au cours des années 1970, ce musicien, peintre et dessinateur se tourna aussi vers le théâtre de Brecht et de Dario Fo. En 1999, quand il publie un recueil d’une centaine de ses textes de chansons, il le titre De klank van de stad [Le Son de la ville]. En 2008, l’année de sa mort, un buste de Wannes Van de Velde a été inauguré dans la Breughelstraat.  [PD]



De lichtjes van de Schelde

Classique flamand du kleinkunst [littéralement « petit art » ; en français : variété], « De lichtjes van de Schelde » – « Les Lumières de l'Escaut »  – est devenu une ode à la ville d'Anvers et à son fleuve. Composé par le Hollandais Anton Beuving, le texte raconte l'histoire d'un marin espérant bientôt revoir sa femme et ses enfants après son long voyage. Le chanteur, siffleur et yodleur (et aussi créateur du parc d'attractions Bobbejaanland) Bobbejaan Schoepen l'a mis en musique et enregistré en 1952. Depuis, divers artistes l'ont chanté mais la version la plus émouvante est sans doute celle interprétée par Daan en hommage à Bobbejaan.  [ASDS]




Derroll Adams et David McNeil, deux songwriters de génie

Derroll Adams (Portland, 1925 - Anvers, 2000) était auteur, compositeur, chanteur et banjoïste. Au début des années 50, il croisera la route de Jack Elliott, Cisco Houston et Woody Guthrie. Comme ce dernier, il passera une bonne partie de sa vie à faire le globe-trotter. On découvre un peu ces années d’errance dans sa chanson « Portland Town » dont voici l’histoire.

En 1970, Derroll épousera Danny Levy, sa dernière et dévouée partenaire avec laquelle il s’installe à Anvers. Jusqu’à la fin des années 1980, il donnera de nombreux concerts dans de petits clubs folkloriques intimes ainsi que dans de prestigieuses salles de concerts en Belgique et dans d’autres pays d’Europe. C’est durant cette décennie qu’il sera approché par l’auteur-compositeur-interprète franco-américain David McNeil qui vit en Belgique à l’époque. Juste pour passer du temps avec son idole, David deviendra le roadie de Derroll. McNeil se remémorera quelques années plus tard cette rencontre importante pour lui dans sa superbe ballade « Vieil homme au cœur tatoué » (1978).  [GD]

Anvers a aussi inspiré une autre merveille à David McNeil : « Dans la ville d’Anvers » (1972).


Pour en savoir plus sur Derroll Adams et les chanteurs qui lui ont rendu hommage (McNeil, Donovan, Allan Taylor);



Jack Sels


Jack Sels, saxophoniste anversois, est au jazz, ce que Frans Floris, peintre anversois, fut pour la peinture hollandaise : un artiste influent mais plutôt méconnu. De la mouvance bebop (jazz d’après-guerre des années 50), il admire Charlie Parker. Il entreprend des projets d’envergures, va même jusqu’à réunir un grand orchestre qui rassemblera quelques-uns des meilleurs musiciens de l'époque. Mais il enregistre toutefois assez peu, voire quasi pas. On retiendra qu’à l’écran il signe la bande son du film Les Mouettes meurent au port, dont les phrasés du saxophone, qui accompagnent l’entièreté du film, appuient et accentuent particulièrement la tension dramatique de la fin.  [BB]


Het Antwerps Liedboek

Het Antwerps Liedboek a été imprimé en 1544 par l’éditeur Jan Roulans officiant à Anvers. Il contient plus de 200 textes de chansons en vieux flamand classés par ordre alphabétique, sans aucune note de musique ni illustration. Sous cette apparence austère – son format s’apparente à celui d’une carte postale -, apparaissent pourtant bien des enseignements sur la vie sociale de la première moitié du XVIème siècle. Les sujets abordés concernent d’innombrables préoccupations de la vie de l’époque : l’amour, la fidélité et l’adultère, les grossesses non-désirées, la guerre, l’ivresse, la politique, l’impotence des personnes âgées, la royauté…

Sur les 217 textes de l’opuscule, des recoupements avec divers recueils ont permis d’y associer 138 mélodies, réutilisées pour des chants spirituels. Les arrangements instrumentaux réalisés par les musiciens de l’ensemble hollandais Camerata Trajectina ont tenu compte de l’usage de l’époque. Un beau témoignage.  [NR]



 

Une playlist de PointCulture

coordonnée par Anne-Sophie De Sutter


et réalisée par Bertrand BackelandPhilippe DelvosalleAnne-Sophie De Sutter, Benoit DeuxantGuillaume DuthoitYannick HustacheIgor KaragozianJacques LeduneDavid Mennessier et Nathalie Ronvaux.


photo du bandeau : le rapeur Will Michiels (alias TheColorGrey)

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