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Critique

Les Amazones d'Afrique: République amazone

Les Amazones d'Afrique
Les Amazones d’Afrique se présentent comme un ensemble de musiciennes engagées dans le combat pour l’égalité des genres. À Flagey, le samedi 18 novembre 2017.

L’intention est ainsi d’emblée présentée de manière forte, comme une entreprise collective, bien avant le fait que le groupe est aussi ce qu’on pourrait appeler un supergroupe, constitué d’une dizaine de très grandes pointures de la musique africaine.

Prises individuellement, chacune des musiciennes mériterait un paragraphe entier. Originaires du Mali, du Nigéria, du Bénin et du Gabon, plusieurs d’entre elles ont une carrière internationale. Toutes ont décidé de faire des Amazones un projet où l’ego de chacune passerait après les idées défendues par le groupe. Le projet a commencé avec un trio, on y trouvait trois femmes maliennes : Oumou Sangaré, Mamani Keita et Mariam Doumbia (une moitié du duo Amadou et Mariam) rassemblées par Valérie Malot, qui deviendra leur coordinatrice. Le noyau de départ a aujourd’hui été rejoint par Angelique Kidjo, Kandia Kouyate, MariamKoné, Massan Coulibaly, Mouneissa Tandina, Nneka, Pamela Badjogo, et Rokia Koné. Elles sont accompagnées par un groupe mixte comprenant le guitariste Mamadou Diakaté, le producteur Liam Farrel (aka Doctor L). On retrouve Mouneissa Tandina à la batterie.

Sur fond de blues, de funk, de rythmes anciens et de production moderne, elles dénoncent la répression et l’oppression dont sont encore victimes les femmes dans des sociétés africaines encore traditionnellement patriarcales, que ce soit sous la forme de violence domestique, de violence sexuelle, d’accès refusé à l’éducation ou au travail, ou de dépendance financière. Pour cela elles affrontent une culture dans laquelle la résistance au changement est soutenue par une hypocrite défense des traditions. Dans cette vision des choses, le féminisme est considéré comme non-africain, ce serait un dévoiement de la tradition et de la culture africaine par l’influence corruptrice de l’Occident. Comme le souligne également l’écrivaine féministe nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, dans son livre Chère Ijeawele, ou un manifeste pour une éducation féministe, ces excuses pathétiques ne peuvent permettre de justifier ou de compenser les souffrances qui résultent des mariages forcés, de la polygamie, des mutilations génitales ou du viol utilisé comme arme de guerre. Aussi est-il urgent pour les femmes africaines de trouver la voie d’une égalité des droits.

Les Amazones représentent plusieurs générations différentes de femmes africaines. Elles ont choisi leur nom en hommage à celles qui les ont précédé, les Amazones du Dahomey, pour la partie historique, une armée de guerrières redoutables qui défendaient les frontières de l’Afrique de l’Ouest au XVIIIème siècle, et pour la musique les Amazones de Guinée, un des premiers groupes afro-pop entièrement féminin. Sur cet album, République Amazone, publié par le label Real World, Les Amazones chantent alternativement en français, en anglais, en fon et en bambara. Outre la dénonciation des injustices, leurs textes cherchent avant tout l’émancipation des femmes. Des chansons comme « I Play the Kora », par exemple, utilise l’exemple très symbolique d’un des plus beaux instruments africains, dont l’usage a très longtemps été strictement réservé aux hommes. Si leur détermination est ferme, les Amazones se défendent toutefois d’être des enragées, comme on présente trop souvent les féministes, et voient dans ce disque une lettre d’amour aux hommes, qu’elles appellent à les rejoindre dans leur combat pour l’égalité.

Benoit Deuxant


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